Archive pour avril 2007

pourquoi avoir peur d’un 21 avril bis, le scrutin était le 22 ?

Les dix petits nègres

 

 

« Sarkozy ne représente-t-il pas un risque de dictature ? »

– un journal suédois[1]

 

« Ils sont douze, ce soir il n’en restera plus que deux. C’est à Vous de voter ». c’est un peu comme ça qu’ils auraient du faire leur publicité pour la soirée électorale sur les chaînes de télé française, une sorte de « loft présidentiel », de « candidat academy », de « nouvelle star des présidentielles », voire de « je suis un candidat, sortez-moi de là ». A vous de choisir, a vous d’éliminer ou de garder. Surtout éliminer d’ailleurs, plus que garder, d’autant plus que le vote utile semble avoir suppléer pour de bon le vote idéologique, vote utile pour qui d’ailleurs ? pour quoi ? contre qui ? contre quoi ? pour un parti ou pour la nation ? Le vote utile, notion qui veut tout et rien dire, nouveau dogme électoral, venant tour à tour à la rescousse de la chute d’un parti, à l’aide d’un novateur ( ou en tout cas, c’est comme cela qu’il se présente) de la politique française ou même du plus conservateur des conservateurs,  Joe Dalton[2]. Qu’est ce que cela signifie donc de voter utile dans ce contexte où le concept, qui, un jour sans doute a eut une légère signification aujourd’hui ne veut plus rien dire ? Je n’avais pas envie de rentrer dans cette politique qui devient plus stratégie que conviction, qui devient calcul à la place des idées. On craignait la trop forte influence des Etats-Unis sur notre système électoral où la personnalité du candidat devient prépondérante sur les idées. Mais nous, on a trouvé mieux, un concept[3] ( pourtant bien creux) pour suppléer le vote selon les idées. Chaque électeur dans la cuisine, sous la douche ou aux toilettes s’est donc mué en petit stratège, évaluant les chances de chacun des candidats de barrer la route à celui (ou ceux et du coup, le vote utile devenant encore plus obsolète) qu’on ne veut pas. Du coup, la raison a clairement pris le dessus sur la conviction. Mais il faut de la raison pour une élection, il s’agit de choisir un président, pas de savoir si on achète des pâtes ou du riz pour ce soir[4]. Non, c’est la mauvaise raison qui a gagné du terrain, celle qui transforme un rendez-vous amoureux en stratagème aux allures militaires, celle qu’on distille parfois dans les relations sociales pour en quelque sorte les optimiser, celle du calcul en bref. Et puis, le vote utile, à l’extrême, ça devient, un vote pour l’utilitaire, pour l’efficacité. Dans ce cadre, ce n’est plus la démocratie qu’il faut, mais la technocratie. Et Jean-Marie d’ajouter, «  pour ça, on a déjà Bruxelles »[5].

 

 

« Un macho sans scrupule qui joue avec la peur des gens »

 – süddeutsche zeitung ( Munich)

 

 

Alors face à tout ça, j’ai quelques nostalgies pour les élections d’antan, pour parodier Brassens à qui manquaient les funérailles d’antan[6]. Oui, ces élections où tout le monde avait sa chance, même si c’était bien relatif, où les « petits candidats » étaient un peu plus que des nègres, de ceux qui bossent pour les autres, qui suent sang et eau pour affirmer leur différence et leur identité. Tous ces nègres qui en quelque sorte, si Aimé Césaire veut bien me permettre de dévier ses concepts, appliquent la Négritude au champs politique français en insistant sur leurs différences, leur identité propre, si souvent bafouées par les partis dominants. Biens sûr, ils ont toujours servi de réservoir électoral pour les « favoris » pour le second tour, mais ils avaient une certaine autonomie et n’étaient pas nécessairement dans l’ombre de leur candidat de tutelle, celui pour qui ils allaient se rallier au second tour. En ce temps là, on pouvait encore voter pour qui l’on souhaitait au premier tour, parce qu’en moyenne disposant de 10 candidats, on peut trouver quelqu’un à peu près à son goût. Mais il semblerait que le 21 avril ait bien eu des répercussions considérables. Et il faut bien avouer qu’après avoir parcouru les articles sur les soirées électorales chez des différents partis, j’ai ressenti dimanche soir, un grand vent de nostalgie vespérale. Je pensais à Arlette qui faisait son dernier tour de piste devant un parterre quasi-vide après avoir fait rêver tant de femmes et d’homme, après avoir scandé tant de « travailleuses, travailleurs », à Marie-George qui semblait malgré elle, décidée à enterrer une bonne fois pour toute le PCF au point d’entendre des militants proposer après son intervention des boissons gratuitement parce que, bah parce que personne n’en avait pris, à Dominique qui, sur ce plateau Télé, ne s’apitoyait même pas sur son sort et faisait déjà campagne pour Ségo. Comme si, elle ne lui avait pas assez fait de mal comme ça… remarquez, elle n’est pas la seule : Hulot est aussi, à mon avis, un des premier coupable du désastre des verts qui décidément ont besoin de se mettre au vert : l’intrusion de Hulot dans le monde politique a donné un sérieux coup d’arrêt à l’écologie politique en France : ce n’était pas son rôle de venir à ce point dans le champ politique. Et je ne dis pas seulement ça parce que c’est Hulot, j’aurais dit plus ou moins la même chose si un membre de Greenpeace se serait présenté sous la bannière Greenpeace aux élections. Il faut des interactions entre les mouvements associatifs et la politique mais pas une confusion des genres, surtout quand la personne en question dispose d’une aura médiatique sur-dimensionnée qui risque de fausser l’impact réel de l’intrusion. De même son idée de Pacte écologique est tout aussi funeste pour l’écologie française : c’est le nivellement des candidats à l’élection sur le plan écologique, c’est donc mettre au même niveau tous les signataires, considérer les programmes environnementaux de Sarkozy et Voynet au même niveau parce que les deux l’ont signé[7], c’est donc faire croire que tous les candidats se valent sur ce point, que la cause écologique est acquise et qu’un consensus des candidats existe sur ce point puisqu’ils l’ont tous signé ( ou presque). Comme j’avais lu dans un bouquin, «  quand tout le monde est vert, personne n’est vert ». Le pacte écologique, c’était aussi mobiliser tout le monde sur l’environnement pendant 1 semaine ( surtout que Hulot ayant obtenu l’accord de tout le monde sur ce pacte, cela ne faisait plus débat donc plus recette pour les médias, donc aux oubliettes, l’environnement) pour que plus personne n’en parle par la suite, c’est donc finalement l’éclipser du débat. Mais Voynet est aussi responsable de son propre échec et notamment son obsession de faire la cour à Hulot ( jusqu’à vouloir obtenir l’autorisation de mettre des citations de lui dans sa profession de foi !!). Mais je ne veux pas non plus être trop dur avec sa campagne[8], tout simplement parce que je ne l’ai pas trouvé si mauvaise et mon vote pour elle me fait dire que je la soutiens (même si mon vote correspond sans doute plus à un soutien des verts et de la cause écologiste en général qu’un soutien à la personne même de Voynet).

 

 

« L’homme politique le plus ambitieux et le plus impitoyable d’Europe qui n’a pas de vrai conviction mais s’aligne sur l’humeur du peuple »

– Frankfurter Allgemeine ( Francfort).

 

 

Oui ils me manqueront ces dix petits nègres, ces dix qui ont bossé comme des dingues pendant cette campagne et qui seront sans doute encore moins nombreux à la prochaine édition ( si prochaine édition il y a, parce que Joe Dalton voudra peut-être changer tout ça… il aura déjà attendu un bout de temps pour être élu une 1ère fois, alors, si on peut éviter les démarches administratives ( ie, le vote), on va pas se gêner). C’est vrai que j’ai bien peur que l’on vire vers un système de bipartisme ( peut-être tripartisme si Bayrou réussit à s’imposer, ce que j’espère pas parce que je soutiens ses idées mais bien pour le maintien de la pluralité partisane). Alors certes, 10 candidats c’est sans doute beaucoup. Surtout à la gauche de la gauche comme on a pris coutume de dire, mais quand je vois le nombre de partis russes libres (j’entends par-là les partis qui ne sont pas directement ou indirectement des projets du Kremlin) qui se réduit comme peau de chagrin, je préfère que l’on ait 10 partis capables de présenter des candidats aux présidentiels.

 

 

Lui confier le pouvoir «  c’est comme organiser une

barbecue partie dans l’Estérel en plein été » –

Jacques Chirac

 

 

Mais en ces temps électoraux vécus loin de France, je pense régulièrement au système de mon pays d’accueil. A plusieurs égards, le système Finlandais est enrichissant. D’abord pour son initiative en 2001 d’avoir changer la constitution pour un régime nettement moins présidentiel. Le président Français est, à mon avis trop influent, ne serait-ce que désormais sur le résultat des élections législatives qui risque de suivre celui des présidentiels dans tous les cas. Il y aura de nouveau, un parti contrôlant tous les pouvoirs. La Finlande, elle par contre, n’a que très rarement un seul parti au pouvoir ( ou une coalition du genre gauche plurielle ou UMP-UDF). La Finlande est un pays de coalition. Coalitions parfois très surprenantes comme celle de 1995 surnommée « coalition arc-en-ciel » qui allait de la droite à l’extrême-gauche…Coalition large, vous allez penser, mais comment ils gouvernent alors ? eh bien, le compromis est bien un mot français, mais on peut se demander si il n’est pas d’origine finlandaise… On se met d’accord, on travaille ensemble, on collabore ( sans connotation négative), on discute, on trouve des accords. N’est-ce pas d’ailleurs réellement ce que devrait être tout système de démocratie représentative ? il s’agit de représenter l’ensemble de la nation (et non pas seulement ceux qui ont voté pour le parti majoritaire, il s’agit donc d’appliquer une politique qui convient plus ou moins à TOUTE la nation) et donc des opinions diverses pour ensuite trouver des consensus sur ces opinions pour pouvoir gouverner et avancer. Comme disait Aron : « Qu’on soit de droite ou qu’on soit de gauche, on est toujours hémiplégique »[9]. Comment représenter une nation quand un seul parti est au pouvoir ? le parti va faire ses petites réformes dans son coin, contre une partie des citoyens et lorsque l’autre parti va arriver au pouvoir ensuite, il va tout défaire ou mener une politique contraire. Ne vaut-il pas mieux chercher le dialogue dès le début, chercher le consensus au lieu de l’affrontement qui ne mène à rien et bien souvent fait reculer ?

Alors, c’est sûr ça fait moins héroïque tout ça, ça fait un peu parlement pantouflard qui négocie, discute en lieu et place d’envolées lyriques lancées par les leaders des différents partis, de ces tumultueuses séances de l’assemblée nationale où les éléphants se lancent des piques et autres invectives. C’est vrai que c’est pas le même genre, « les parlements travailleurs » comme ils disent. Et puis, cela pose aussi la question du respect des électeurs lors de la formation des coalitions : des élections législatives ont eu lieu en Finlande, il y a 1 mois et demi et la formation du gouvernement n’est pas encore tout à fait officialisée et surtout, cette formation se décide derrière des portes closes : le parti du centre est arrivé en tête et donc le premier ministre sortant (du centre) mène les négociations avec les différents partis pour former une coalition tenable, en tenant compte des résultats obtenus aux élections et des thèmes abordées dans l’élection. Ainsi, selon, les thèmes importants, des partis peuvent prendre de l’importance, comme cette année les questions d’environnement et d’énergie qui ont poussé le premier ministre à intégrer les verts dans son gouvernement, ce qu’ils ne refuseront pas alors qu’ils seront pourtant dans un gouvernement de centre droit[10]…impensable en France. De plus, lors des négociations, rien ne fut exclu et le parti Social-démocrate, grand perdant des élections (il n’était pas dernier, loin de là, mais a perdu beaucoup de sièges), a lui aussi participé aux négociations, et un temps il ne fut pas exclu qu’il participe aussi au gouvernement. Parce qu’ici, il y a véritablement deux temps politiques : les élections, où les partis s’affrontent et le temps où l’on gouverne et donc où l’on discute au delà des frontières partisanes. Evidemment il est bien difficile dans ce cas d’avoir des politiques extrêmes dans un sens comme dans l’autre, puisque aucun parti n’imposera ses idées face à celles des autres, alors on peut parfois regretter le manque d’engagement qui peut s’ensuivre mais on peut se féliciter la constance du système qui fait que les grandes lignes politiques sont prises pour longtemps et ne risquent pas de changer à chaque nouveau gouvernement puisque tout le monde a été consulté auparavant, même si l’on est dans l’opposition. Alors, moi qui si souvent critique la vision à court-terme des politiciens, je ne peux qu’applaudir des deux mains ce système qui permet des réformes sur le long-terme sans penser aux lendemains, autrement dit aux prochaines élections qui risqueraient de tout foutre en l’air. Alors, c’est vrai que le citoyen vote pour un parti sans savoir dans quelle alliance il va ensuite s’engager, et cela peut poser problème, mais cela permet aussi d’éviter qu’un cinglé soit seul à diriger…

 

 

 

 

 

 

 

« son égotisme, son obsession du moi lui tient lieu de pensée. La critique équivaut pour lui à une déclaration de guerre qui ne peut se terminer que par la reddition, l’achat ou la mort de l’adversaire.[…]

Chirac, lui a le souci des autres, de l’homme. Sarkozy écrase tout sur son passage. Si les français savaient vraiment qui il est, il n’y en a pas 5% qui voteraient pour lui »

 – François Goulard, ministre libéral.

 

            A propos de cinglé, je ne pouvais m’empêcher de finir sur une petite diatribe sur notre futur président. J’en profite, peut-être qu’après on ne pourra plus…j’en profite aussi, parce que c’est toujours nécessaire et surtout urgent. Comme je commence à me persuader ces temps-ci : « la gauche, c’est le progrès, la droite, c’est le regret ». Et je pense que cela risque d’être encore plus vrai que jamais lors de ce 2nd tour. J’ai bien peur que l’on regrette de l’élire. Je pense avec une certaine conviction, que ce 6 mai prochain est un choix important. On pourrait se dire qu’il s’agit seulement d’un classique duel entre la gauche et la droite. Mais je pense que cela va bien au-delà. C’est une vision du monde qui est différente. Entre une vision Sarkozy-centrée et une vision ouverte au-delà de la personne-même du candidat, il y a un véritable fossé. Les quelques exemples semés ici et là dans ce texte donne déjà un certain aperçu du personnage. Un égo surdimensionné, une ambition sans commune mesure, un irrespect total pour TOUS les autres y compris ses proches collaborateurs,…la liste des défauts est bien longue. J’ai toujours appris qu’il ne fallait pas voter sur la personne mais sur les idées ( en plus, dans son cas, si on regarde les idées, c’est pas mieux ). Mais là, il me semble que s’interroger sur la personne peut s’avérer plus qu’utile. Un dictateur en puissance, ça peut s’éviter si on fait attention à qui on a affaire. Les idées et les objectifs auront beau s’avérer plus que louables (malheureusement, dans son cas, elles ne le sont même pas), il faudra toujours s’interroger sur la manière de les mettre en place, les moyens utilisés. La célèbre formule «  la fin justifie les moyens » rappelle toute l’animalité qui sommeille en nous : être prêt à tout pour en arriver à une certaine fin, quitte à oublier un instant notre socialité, notre raison ( ou pire encore, la mettre à contribution), notre humanité en bref.

Face à Sarkozy, j’ai l’impression de lire « Le prince » de Machiavel ( ou « comment obtenir et conserver le pouvoir » selon les dires de l’auteur), d’observer un homme obsédé par le pouvoir ( et surtout le sien, parce que j’espère que vous l’avez compris mais rien au delà de sa personne ne l’intéresse) qu’il semble prêt à tout pour ça, qu’il semble prêt à utiliser à la fois Jaurès et De Gaulle, Jean Paul II et Mitterrand sans trouver une contradiction, puisque cela apparaît cohérent dans l’optique de sa prise de pouvoir. De même, il n’a de vertu que politique et non morale : comme dit dans « le Prince », il se doit de doser comme il faut la peur et l’amour pour conquérir et conserver le pouvoir, pour conserver le calme dans la cité ce que semble appliquer Sarkozy à merveille en mêlant crainte et admiration pour sa personne. De même le Prince ne doit exclure aucun moyen pour conquérir le pouvoir, y compris la trahison, art dans lequel Sarkozy excelle depuis quelques années.

J’ai également lu il y a quelques années de cela «  le meilleur des mondes », ce chef-d’œuvre de la science-fiction d’Aldous Huxley où la sélection génétique est établie en règle générale, où la vie est encadrée, que dis-je conditionnée, du début à la fin. Il s’agit bien d’un récit d’anticipation, mais je veux qu’il reste du domaine du RECIT. Alors faisons en sorte que tout cela reste de la fiction. Alors le 6 mai, vous savez ce qui vous reste à faire…. Sinon, il n’y aura pas que les dix petits nègres ( et pas seulement au sens propre) qui devront faire leur bagages… [11]

 

jeudi 26 avril 2007.

[1] Les citations de ce genre et qui vont être parsemées le long du texte sont issues de Marianne ( du 20 avril 07) que j’invite tout le monde à lire pour finir de vous convaincre qu’à partir du 6 mai prochain, il va falloir lutter, résister et ne rien lâcher pendant cinq ans pour tenter de préserver des éléments de démocratie, de solidarité, de protection de l’environnement. Souvent ces derniers jours, je me dis en plaisantant que je vais rentrer dans la résistance, comme aux heures noires de la France collabo, mais d’autres jours, je me dis que cela n’est peut-être pas si faux…

[2] Dénomination utilisée par Djamel que je n’arrête plus d’utiliser depuis que je l’ai entendu, ce texte ne fera donc pas exception.

[3] Parce qu’en France, on aime bien les concepts, les jargons et les trucs de ce genre, les trucs qui font classe, qui font intelligent même si derrière, ça ne veut rien dire…

[4] Remarquez, certains profiteraient bien de cette phrase pour faire une comparaison entre l’alimentation et la politique française depuis 30 ans : un choix qui se résume entre le riz et les pâtes ( je vous laisse choisir qui est qui ). Mais désormais on a aussi une patate.

[5] En fait  c’est pas une citation, mais un résumé de sa pensée en matière d’Europe…

[6] Par contre ne prenez pas cette référence aux « funérailles d’antan » au premier degré, loin de moi l’idée qu’une élection peut ressembler à des funérailles, quoique… pour Marie-George, Dominique et peut-être la France le 6 mai prochain, ça ne sera pas très éloigné…

[7] et pourtant que de différences, entre un Joe Dalton qui soutien l’EPR (et issu d’un gouvernement qui a fait passé le décret d’autorisation de la construction de l’EPR en douce, il y a 2 semaines, un autre scandale tant écologique de démocratique), ne veut pas de moratoire sur les OGM (alors que même sans être farouchement contre, les insuffisances législatives sont flagrantes et nécessite un moratoire pour tout remettre à plat), qui ne considère pas l’écologie comme une idéologie essentielle et qui doit être mise au cœur de son programme et une Voynet qui s’engage contre l’EPR , les OGM, demande un moratoire sur la construction d’autoroute, chiffre une réduction d’émission de CO2,…

[8] et puis sur la question de son manque de charisme, j’ai été rassuré dimanche soir en écoutant Ségolène qui fut vraiment pire : pendant un instant j’ai même cru qu’elle se présentait simplement pour faire la prochaine dictée de Pivot et non à la présidentielle. J’espère que d’ici le 6 mai, elle va retrouver de l’enthousiasme, du rythme, des idées, bref qu’elle va devenir présidentiable, parce que sinon, elle peut dès à présent jeter l’éponge, comme ça elle sera déjà en vacances…

[9] repris par Desproges qui ajoutait que Raymond Aron était de gauche…

[10] le parti du centre ( anciennement agrarien), un parti de centre-droit, le parti suédophone assez difficile à situer sur l’échiquier politique et donc les verts.

[11] Parce qu’imaginez qu’il perde, pour lui, c’est LA traversée du désert : il enchaînera le Sahara, le Sahel, le Kalahari, le désert de Gobi et le Bush ( qu’il semble tant apprécier !!!).

Ushuaia civilisation

Ushuaia Civilisation : les Erasmus.

 

 

Eh oui à l’instar de mon collègue « environnementaliste » Nicolas Hulot, j’ai décidé de me mettre au documentaire, parce que pour l’instant l’écologie, ça fait pas recette, alors comme il faut bien gagner son pain…Sauf que moi, pour une fois, je vais m’intéresser à une autre faune que la sienne, une faune qui n’en est pas une au sens propre du terme, puisque, comme l’indique le titre, il s’agit d’ « Ushuaia Civilisation » et non d’ « Ushuaia nature » comme lui. Bon je vous propose tout de suite de regarder le reportage et on en reparle ensuite :  

 

« Bonjour à tous et bienvenu dans ce nouveau numéro d’ « Ushuaia civilisation ». aujourd’hui, après avoir exploré le mois dernier cet étrange écosystème qu’est le centre commercial, écosystème auto-régulé mais aujourd’hui menacé par la conscience écologique et alter-capitaliste, nous partons à la rencontre du non moins curieux milieu erasmus. Il faut d’abord rappeler que cette espèce est des plus récentes. Les paléontologues n’ont jusqu’à présent retrouver des fossiles d’erasmus[1] ne datant que des années 80. C’est tout dire si l’espèce est jeune et l’observation, de ce fait, encore à ses balbutiements. Les méthodes d’observation sont donc encore quelque peu rudimentaire et les connaissances encore bien minces du fait du tâtonnement de la recherche en la matière qui a toujours certaines difficulté à cerner le comportement de cette espèce.

 

Selon les scientifiques, les erasmus descendent de l’espèce étudiante. Selon certains il ne s’agirait que d’une sous-espèce, dérivant du groupe commun étudiant mais dont l’évolution dans un milieu différent l’aurait fait dériver vers une certaine différentiation génétique et comportementale. De l’autre côté, certains scientifiques défendent un point de vue opposé selon lequel l’espèce erasmus en tant que telle existe depuis plus longtemps et donc ne serait pas lié ni biologiquement, ni phénétiquement, ni phylogénétiquement, ni écologiquement à l’espèce étudiante. L’espèce erasmus aurait donc évoluée en parallèle à l’espèce étudiante et ne descendrait absolument pas de celle-ci. Il reste à trouver le chaînon manquant qui ferait le lien entre ces deux espèces qui, malgré tout, comportent certaines similitudes. Les scientifiques défendant cette deuxième hypothèse recherchent donc actuellement un ancêtre commun à ces deux populations. Les recherches en la matière s’orientent actuellement vers les humanistes de la renaissance qui avaient pour caractéristiques essentielles celles de voyager et d’étudier, deux éléments présents chez les deux espèces, quoique celle du voyage soit moins marquée chez les étudiants que chez les erasmus chez qui elle s’avère être essentielle. Mais suite à de recherches récentes, il semblerait que cette deuxième hypothèse prennent le pas sur l’autre théorie, puisqu’il s’est avéré qu’aux XVèmes et XVIèmes siècles vécut un homme appelé Erasme, un humaniste hollandais, celui-là même qui a donné son nom à l’espèce erasmus. Mais comme nous allons le voir par la suite, Erasme ne possédait pas les mêmes caractéristiques que les erasmus. Erasme n’était donc pas un erasmus. Il n’était pas non plus étudiant puisqu’il arriva par moment qu’Erasme travailla. Mais malgré tout, il possédait bien ces deux éléments communs que sont les études et les voyages. Cela en fait-il le chaînon manquant ? Il est sans doute trop tôt pour le dire mais il constitue un élément de compréhension essentiel des deux espèces et de leur évolution respective.

 

Mais éloignons-nous quelque peu des débats théoriques pour en venir à l’observation directe des erasmus, pour mieux comprendre leur mode de fonctionnement, ou tout du moins l’appréhender puisque l’espèce semble avoir des comportements pour le moins inédits. Comme pour beaucoup d’espèces, l’alimentation et la recherche de nourriture s’avèrent être un moyen des plus prolifique pour mieux cerner la bête. Pour ceux qui est de la recherche de nourriture, il faut bien avouer que le milieu civilisationnel[2] joue un rôle essentiel au point parfois de faire subir à l’espèce des mutations génétiques importantes afin de permettre une meilleure adaptation à  son environnement. Ainsi il semblerait que l’estomac et l’ensemble du système digestif se soient adaptés à l’alimentation de l’erasmus, elle-même ayant évolué suite à l’éloignement des parents de l’erasmus. Cet éloignement parental s’ensuit en général d’une alimentation très aléatoire, loin du cocon familial où l’erasmus avait pris l’habitude d’être nourri par la mère. De ce fait l’alimentation est principalement basée sur la pizza, les sandwichs, les pâtes, le riz, les pommes de terre (en général préparées de la façon la plus sommaire). L’alimentation est donc caractérisée par un manque de recherche évidente, comme si l’erasmus n’avait pas été préparé dans son enfance à faire face à cette situation.

 

Pour certaines catégories d’erasmus, il faut tout de même chercher d’autres facteurs extérieurs pour expliquer cette faiblesse alimentaire : certains erasmus vivent dans des milieux relativement hostiles où la nourriture se fait plus rare et plus dure à acquérir. Il m’est déjà arrivé d’observer des erasmus scandinaves, et ceux-ci, face aux prix de la nourriture devaient pénétrer sur le territoire d’une autre espèce : les pauvres. J’ai pu donc observé cette scène quasi-inédite partout ailleurs : la présence d’erasmus cherchant de la nourriture dans un Lidl, pourtant chasse-gardée des pauvres. L’influence du milieu semble donc d’une importance capitale pour cette espèce, le milieu déterminant ainsi quelque peu le comportement de l’erasmus. Mais cela semble également révéler une grande force de l’erasmus, celle de sa capacité à s’adapter à de nouveaux milieux avec une rapidité rarement observée jusqu’à présent.

 

Mais les influences internes ne sont pas non plus négligeables pour expliquer le comportement alimentaire de l’erasmus : il semblerait que le milieu d’origine (puisque est-il encore nécessaire de le rappeler mais l’erasmus se définit par sa grande mobilité, passant d’un milieu à l’autre avec une grande fréquence) joue une importance déterminante dans son mode alimentaire, que ce soit en terme temporel (les erasmus germaniques sembleraient plus apte à manger à des heures précoces alors que les transalpins et les ibériques seraient plus disposés à attendre la nuit pour manger) ou en terme matériel ( la composition du repas variant d’un milieu à l’autre : les transalpins axant leur alimentation sur les pâtes ( même si celles-ci semblent s’être imposées comme dénominateur commun à tous les erasmus, ayant vu en ces morceaux de blé agglutiné une proie idéale), alors que les germaniques basent leur alimentation sur la charcuterie, proie elle aussi en abondance et donc facile à chasser. Quant aux gaulois, dont le milieu est empli de traditions alimentaires très élaborées, la situation s’avère très variable, certains semblant avoir disposés d’une éducation importante en la matière alors que d’autres n’ont, semble-t-il reçu qu’un faible héritage familial en la matière).

 

Mais les erasmus établissent eux-même dans le milieu dans lequel ils évoluent des conditions favorables ou non au développement d’une alimentation riche. Ainsi la question de l’état de l’habitat de l’erasmus s’avère être un élément essentiel : l’habitat erasmus se caractérise en général par une grande concentration de la population erasmus dans des lieux restreints. Il s’en suit une certaine promiscuité. De cette promiscuité peut, malheureusement, très souvent découler une dégradation de l’habitat erasmus. L’erasmus semble ainsi faire partie de ce groupe d’espèce capable de ne prendre aucun soin de son habitat, capable même de le détruire. Je profite donc de l’occasion, pour rappeler à l’ordre les autorités publiques de tous les pays qui abritent des communautés d’erasmus : protégez leur habitat, garantissez-leur des conditions favorables pour qu’eux-mêmes se sentent prêt à prendre soin de leur habitat. Protégeons la biodiversité de la Terre, protégeons les erasmus qui en font partie à part entière. Cette espèce est nécessaire à l’équilibre biologique de la planète, alors, tous, protégeons-les.

Mais revenons à la dégradation de leur habitat. De nombreux éthologues se sont penchés sur la question pour expliquer cette étrange attitude mais il manque encore de nombreux éléments pour élaborer une théorie d’ensemble sur le sujet. Malgré tout, une rapide observation peut donner un aperçu de la situation et peut donner certaines clés pour percer ce mystère.

La dégradation de l’habitat concerne essentiellement les lieux destinés à l’alimentation : il a notamment été observé dans un groupe d’erasmus vivant en Finlande dans l’habitat nommé par les scientifiques Lapinkaari, une dégradation rapide des cuisines de ce groupe. Les mouvements migratoires ( les erasmus étant bien entendu une espèce migratoire, bien loin de la sédentarité, migrant à la recherche de nouvelles sensations, de nouvelles rencontres) en ces lieux se produisaient essentiellement en trois instants : le premier se situait aux derniers jours d’août où de nombreux erasmus arrivaient. En décembre-janvier, on pouvait observer un chassé-croisé entre de nouveaux arrivants et d’autres sur le départ. Enfin en mai-juin, les plus tardives quittaient les lieux à la recherche d’un autre habitat erasmus ou pour un retour dans le nid familial (étape qui peut paraître étonnante pour les connaisseurs des espèces animales traditionnelles puisque les erasmus se révèlent être l’une des rares espèces à revenir par moment au sein de la famille alors que chez toute autre espèce (excepté les étudiants qui partagent cette caractéristique avec les erasmus), le départ du giron familial est définitif). Toujours est-il que sur les périodes de septembre à décembre et de janvier à mai, les dégradations de l’habitat se sont avérées très nombreuses : vaisselles non-lavée (jusqu’à l’installation de boite en carton pour stocker cette vaisselle par les femmes de ménage prenant soin de ce milieu naturel, mais solution qui ne me paraît être des plus relevantes pour aider à un environnement propre et sain puisqu’il a pu être noté que suite à l’installation de ces boites, la vaisselle avait tendance à s’entasser encore un peu plus[3]), plaques de cuisson dans un état peu enviable, sol et plafonds régulièrement salis, tables encombrées et bien souvent elles aussi sales, poubelles remplies à ras-bord sans qu’aucun ne réagisse.

Toutes ces dégradations sont intervenues dans le présent cas à une vitesse pour l’instant jamais observée auprès de d’autres espèces vivantes. Mais ce qui s’avère le plus intéressant dans cette situation sont les répercussions sur le mode alimentaires des erasmus : face à cette dégradation et à un habitat désormais peu ragoûtant, de nombreux erasmus perdent leurs habitudes culinaires, adoptant un mode de vie plus prédateur axé essentiellement sur la chasse à la pizza et à la charcuterie, en lieu et place de l’élevage des légumes et autres produits frais.

 

 

Mais les habitudes alimentaires ne sont pas tout, et spécialement chez les eramus, où comme on vient de le voir, l’alimentation occupe peu de place. Il faudrait de ce fait plus insister sur la boisson et la vie sociale, sans doute bien plus caractéristiques de leur mode vie. Ainsi certaines espèce vivent d’amour et d’eau fraîches, les erasmus, eux vivent de sexe et de bières fraîches[4]. La recherche de boissons alcoolisées constitue ainsi une des activité essentielles des erasmus. Malgré l’importance de la tâche, ici, pas de division du travail entre mâle et femelle comme on peut l’observer chez d’autres espèces qui relève d’une haute importance, comme ce peut être le cas chez les homo politicus, cette étrange espèce qui se refuse à confier tout pouvoir politique de haute importance aux individus femelles. Chez les erasmus, tout le monde boit[5], en ce point, on peut se dire que l’égalité des sexes est acquise chez cette espèce, mais dans ce cas est-ce vraiment une bonne chose ? Malgré tout cette relation quasi-fusionnelle avec l’alcool se révèle être d’un grand intérêt académique. Des comportements, jusque là inconnus chez d’autres espèces animales se rencontrent ici.

C’est ainsi que l’analyse de ces comportements révèlent des différences notables de la consommation du pauvre. Les pauvres boivent pour oublier, oublier leur situation difficile dans leur écosystème de pays riche alors que, en quelques sortes, les erasmus boivent pour se rappeler, se rappeler qu’ils sont en vie, puisque leur consommation d’alcool est une « consommation festive » ( par opposition à la « consommation déprime » des pauvres), une consommation pour se réjouir, pour profiter. C’est bien ce point qui fait aujourd’hui débat dans les arcanes académiques : cette population a toujours été reconnue comme heureuse en elle-même. Alors pourquoi utiliser un subterfuge pour justement atteindre un état de bonheur ? l’explication bien souvent ( et qui n’en convient toujours pas certain) est celle de l’ivresse, qui, selon les défenseurs de cette théorie donnerait un autre goût, une autre saveur au bonheur. L’ivresse est également un phénomène observé par les spécialistes des pauvres.

Mais la signification psychosocial de cette ivresse semble être radicalement différente chez les deux populations. Cette signification se veut également bien différente du fait du mode de consommation de l’alcool chez les deux espèces :alors que la consommation d’un pauvre est bien souvent régulière et continue, celle de l’erasmus est plus irrégulière mais souvent plus intensive. On pourrait aussi opposer une consommation solitaire et personnelle du pauvre à une consommation mondaine chez l’erasmus. Du fait de cette consommation mondaine, on a pu observer chez les erasmus un ensemble de rituels entourant la consommation d’alcool, rituels jusque là inconnus des scientifiques. Un des plus étrange est sans doute cette réappropriation du jeu pour des objectifs moins candides. Ce qui est traditionnellement une pratique irrationnel ( spécialement chez les pauvres qui boivent sans compter, sans raison directe) en devient une pratique bien rationalisée. Au travers du jeu, c’est toute la consommation d’alcool qui devient institutionnalisée, codifiée : au lieu de boire à son rythme, sans trop de raison, on se met à boire puisque les règles l’ont ainsi décidé. Boire devient, dans ce processus, une obligation. Il ne s’agit plus seulement d’une norme, d’une habitude tacite entre les erasmus, mais d’une obligation, les règles du jeu réglementant en quelque sorte la consommation d’alcool. Mais il ne faut pas voir ici les règles comme une limitation, une barrière, mais bien plus comme quelque chose qui incite. Dans la plupart des groupes d’erasmus ayant développé ce genre de rite ( certains groupes ne semblant pas être affecté par ce phénomène), les règles sont formulées de la sorte qu’elles invitent les participants à boire. On peut ainsi à travers ces rites également noter une marginalisation des rares personnes non adeptes de l’alcool. Mais il faut tout même ramener cela au contexte général qui veut que cette marginalisation reste circonscrite à ces rituels et qu’aucune exclusion d’un groupe n’a jusqu’à présent été observée suite à un refus d’alcool par un erasmus.

 

Comme vous l’avez compris, la consommation d’alcool est ici un phénomène social. Il s’avère donc essentiel de s’intéresser aux relations sociales des erasmus d’une manière générale. Ainsi à l’instar de l’étudiant, et de d’autres espèces du genre homo, l’erasmus est une espèce des plus sociales. On peut ainsi considérer l’erasmus comme une espèce grégaire, dont ses représentants ont souvent tendance à se regrouper. Cela tient bien évidemment à la promiscuité de son habitat qui pousse à des contacts rapprochés entre erasmus. Mais il a aussi été observé dans des zones où la promiscuité était plus faible, des même comportements à la fois de mimétisme social et d’activités effectuées en groupe. Il semblerait que les comportements individuels et solitaires soient même très marginaux et rejetés par les membres dominants des groupes d’erasmus. Ainsi, alors que l’homo oeconomicus se caractérise par son individualisme, l’erasmus semble de ce côté avoir échappé à cette tendance ( même si il faut souligner en parallèle que l’erasmus n’est pas exempt de toute tendance individualiste comme le rappelle notamment la dégradation des cuisines qui obéit à un instinct individualiste). L’eramus vit en collectivité, en groupe et se déplace bien souvent aussi en groupe. Des individus isolés ont tout de même été observés dans certaines zones et l’explication à cette attitude reste encore inconnue. Il semblerait que l’erasmus ait un besoin insatiable de socialité, de contact avec autrui et même de rencontre[6]. Cette « fièvre sociale », comme certains l’ont appelé, se traduit bien souvent par un grand enrichissement de l’erasmus mais aussi par l’engluement de certains, qui, à la suite de l’absence de mouvement généralisé, se retrouvent à ne rien faire, à ne pas aller découvrir de nouvelles choses. L’action individuelle en devient en quelque sorte bannie.

 

 

            Les occupations des erasmus sont diverses mais bien souvent suivent un rythme régulier et se reproduisent fréquemment au fil des semaines. Malgré l’importance capitale que constitue l’étude, il semblerait que cette activité soit quelque peu délaissée par certains individus des nouvelles vagues d’erasmus. Pourtant l’étude reste pour une majorité des erasmus l’occupation principale, une occupation structurante qui plus est puisque cette activité demeure réglée par les cours qui fournissent la charpente de la vie erasmus. Les cours occupent l’erasmus et du fait de leur caractère prioritaire, définissent les possibilités pour d’autres activités : ainsi à l’approche d’examens, la vie de l’erasmus se focalise essentiellement sur ce point et d’autres activités peuvent alors être temporairement abandonnées. Il en est de même avec les cours qui conditionnent jusqu’à la vie sociale des erasmus : en cas de cours tôt le matin, certains erasmus se refuseront à toute vie sociale intense la veille ( « éviteront d’aller en boite », comme le notent très justement les scientifiques de l’IHEE) pour pouvoir assister au cours. Même si ce comportement d’insistance sur les études reste la norme, il faut donc bien rappeler ce comportement, encore marginal, où la vie sociale semble avoir pris le pas sur les études. Cette dérive comportementale est en général progressive et le stade de déconnexion totale des études reste très rare et n’est que l’aboutissement d’un long processus d’abandon de la vie des études. Bien souvent cela commence par une absence à un cours. Mais cela se poursuit par ce que les scientifiques appellent « le séchage des examens », parce que l’erasmus se dit qu’il passera le rattrapage. Ensuite c’est bien souvent des essays qui ne sont pas rendus, des présentations bâclées, des cours passés à dormir pour récupérer de la nuit précédente. Toute une série de comportements des plus étranges qui s’enchaînent, restant bien souvent isolés et peu récurrents mais qui peuvent parfois se généraliser et aboutir à une absence totale d’étude dans la vie. Comme je l’ai déjà souligné, la vie sociale est d’une importance capitale pour les erasmus. Celle-ci peut se manifester de différente façon et notamment au travers de « la sortie en boite ». Le sujet est trop vaste pour être détaillé ici, mais les quelques évocations faites ici vous en donnent déjà un petit aperçu. Une autre activité pour le moins étrange s’avère être « le match de foot à la télé ». Même loin de son milieu naturel ( ou peut-être surtout loin de son milieu naturel), le foot est une branche à laquelle l’erasmus peut se raccrocher et donne à voir d’étranges comportements, une branche qui lui permet en même temps de retrouver ses racines, puisqu’il s’agit bien souvent de regarder une « équipe » de son milieu d’origine. Il m’a ainsi été donné l’occasion d’assister à une de ces scènes spectaculaires de « match de foot à la télé ». Ce soir là, je m’étais reclus au sous-sol pour pouvoir jongler en toute discrétion. A côté, la salle Télé. Alors que je jonglais tranquillement, j’ai pu entendre de drôle de cris, d’étranges bruits et d’affreux sons. Cela venait d’à-côté j’en étais sûr. Et pourtant j’aurais pu croire que cela venait de beaucoup plus loin, soit du fin fond des cavernes de la préhistoire soit de la lointaine savane africaine où rugissent encore ( jusqu’à quand ?) les lions, où beuglent les zébus, où piaillent les hyènes. C’était un véritable capharnaüm sonore. Des bêtes en délire qui semblaient acclamer le but de leur équipe favorite. Ils n’étaient pas bien nombreux mais ils faisaient le bruit pour tous les absents. Leur volume sonore était tellement fort qu’il ne me fut plus vraiment possible d’ouïr ma musique le temps que la clameur d’à-côté se calme. 

 

            Je vais désormais conclure cette émission sur une note d’espoir pour tous les protecteurs des erasmus en rappelant que la chasse à l’erasmus (la principale menace pesant aujourd’hui sur l’erasmus, notamment celle orchestrée par certaines administrations) ne s’avère pour l’instant que peu fructueuse du fait de la courte durée de vie des erasmus. Mais cette durée de vie réduite n’empêche pour autant pas la reproduction de l’espèce ( une reproduction par substitution[7]) et les chiffres actuels semblent montrer que l’espèce fait plus que prospérer.

J’espère que vous avez été nombreux à suivre ce programme jusqu’à la fin en découvrant ainsi, un peu plus, la diversité biologique de notre Planète, en espérant que cela donnera envie à tous de mieux respecter toutes les formes de vie qui peuplent notre belle Terre. »

 

 

 

            Bon voilà je finis là l’exploration de ce drôle d’écosystème pour éviter de tomber dans la moralisation. Mais bon, j’avais envie de ce texte sur certains côtés de la vie erasmus qui m’entoure  parce que parfois je me sens si loin de mes compatriotes étudiants que ça pourrait en devenir un sujet d’étude, un sujet d’exploration pour mieux les connaître. Alors ce texte aurait pu s’appeler : «étudiant en erasmus » et être un nouveau remake de « la panique au mangin palace » mais je préfère varier les plaisirs et cette fois rendre hommage à celui raillé dans le remake de « la panique »  que j’ai déjà fait : Nicolas Hulot et ses émissions Ushuaia nature. Alors tout cela ne se veut absolument pas moralisateur (surtout que certains travers ici dénoncés peuvent parfois m’être attribués), ni emprunt de mépris, juste un regard un peu critique et interrogateur sur le mode de vie erasmus, un premier bilan de la vie erasmus à deux mois du retour dans mon écosystème d’étudiant français.

 

 

jeudi 5 avril 2007.

[1] En plus, ça fait vraiment nom scientifique, du genre homo erectus, ou les noms précis des espèces toujours donnés en latin et en italique…

[2] en lieu et place du traditionnel « milieu naturel »

[3] les études statistiques semblent sur ce point assez catégorique : alors que le rythme de croissance de la vaisselle non lavée n’était que de 3% de croissance par jour avant l’installation des boites, le taux grimpe à 10% après l’installation des boites. Il est aussi intéressant de rappeler l’étude qualitative effectuée par le professeur M. Propre qui montre que les erasmus sont moins tentés d’effectuer un nettoyage complet de la vaisselle avec l’installation de ces boites, ces boites constituant ainsi, selon lui, une barrière inconsciente qui effraie l’erasmus du fait de la non-connaissance du contenu de la boite (et de son état). Face à cette barrière et à l’inconnu qu’elle semble cacher, l’erasmus se refuserait à toute immersion dans le carton pour y laver quelque chose. Le professeur rappelle également un « effet d’accumulation » qui semblerait plus important dans cette situation : « alors qu’en l’absence de boite, la vaisselle est répartie en différent lieu, dans la situation postérieure à l’installation des boites, l’accumulation se fait plus évidente et semblerait dissuader toute velléité de nettoyage généralisée ».

[4] ou de tout autre liquide alcoolisé.

[5] Même si il faudrait bien sûr garder en mémoire le rapport, cependant très controversé chez les scientifiques, du Professeur Pinart qui souligne la présence dans tous les groupes d’erasmus de buveurs d’eau. Mais le point sur lequel insiste le professeur, est la marginalisation de ce comportement qui demeure incompris des membres dominants du groupe, imposant en quelque sorte cette norme sociale, cette norme de consommation d’alcool.

[6] Des scientifiques ( de l’IHEE, l’Institut des Hautes Etudes des Erasmus) ont d’ailleurs produits d’intéressantes études au sujet des rencontres entre erasmus. Ils ont notamment mis en évidence l’importance d’un lieu appelé « les boites », lieu privilégié pour les rencontres et notamment entre individus de sexe opposé. La rencontre entre deux erasmus de sexe différent obéit à des codes très précis qui ne sont pas encore tous connus aujourd’hui mais il apparaît certain que la rencontre n’obéit à aucune logique connue ailleurs : la rencontre se fait bien souvent sous l’effet de l’alcool, ce qui explique en partie l’étrangeté du phénomène. Ainsi il est apparu que des erasmus se connaissant déjà, ne se trouvant aucune affinité particulière à ce moment, finissent quelques soirs plus tard dans les bras l’un de l’autre. Mais comme le rappellent les scientifiques de l’IHEE, la caractéristique essentielle de ces rencontres entre sexes reste l’éphémère puisque bien souvent ces rencontres donnant lieu à des contacts rapprochés entre les deux individus voire à des copulations ne durent que quelques jours ou semaines tout au plus. C’est alors à nouveau le temps pour les mâles de la séduction des femelles, phase de séduction, qui du fait de la brièveté de la période de couple, est bien souvent amenée à se répéter à de très nombreuses reprises.

[7] Les erasmus mourrants laissant la place à de nouveaux, en général plus nombreux années après années. Mais à l’image du mythique cimetière des éléphants, le cimetière des erasmus reste jusqu’à présent dans l’ignorance totale des scientifiques qui n’ont pour l’instant jamais pu observé de tel lieu rassemblant les sépultures pour les erasmus morts. Pourtant il est bien avéré que des erasmus disparaissent chaque année, mais le mystère sur leur mort reste entier. Certains scientifiques vont même jusqu’à penser qu’il existe une vie après la mort chez les erasmus. L’hypothèse d’une seconde vie étudiante a ainsi notamment été formulée. Mais les preuves manquent encore pour étayer une telle théorie.