Archive pour janvier 2009

la crise, c’est grave docteur ?

L’espoir a bon dos.

Ou
Dix bonnes raisons de garder

 l’espoir en temps de crise

 

 

J’ai vu des commerçants croire
encore en leur avenir en période de soldes moroses trois mois après que tout le
monde a découvert de ce système le pot aux roses,[1]

 

J’ai vu des américains se réjouir
comme jamais parce que leur nouveau messie est noir après que tous ont subis
dans ce pays les pires déboires,[2]

 

J’ai vu des étudiants qui
s’illusionnaient encore en un système éducatif qui fait apprendre et émancipe,
quarante ans après qu’ils ont pris les pavés pour principe,[3]

 

J’ai vu un cinéaste turc en
pleine rêverie mélancolique mais ô combien émouvante après qu’Hollywood a
réussi à nous vendre tant de films d’épouvante,[4]

 

J’ai ouï dire des politiques il y
a peu encore au ras des pâquerettes qu’ils défendent, ne plus s’occuper de leur
pré carré et faire qu’enfin tous s’entendent,[5]

 

J’ai vu des handicapés qui non
content de ne pas être comme tout le monde, après que toute la société les a
pris en pitié, ont tourné cette dernière en poésie vagabonde,[6]

 

J’ai reçu des nouvelles qui nous
valent de l’oseille pour les valves du cœur, après que l’on a cru que les
années écoulées il ne pouvait être attendu du temps seulement qu’il nous
écœure, [7]

 

J’ai aussi mis de côté la friture
téléphonique pour briser la grisaille ambiante et retrouver l’atmosphère d’une
certaine Strasbourg, après que l’on a pris les chemins à rebours,[8]

 

J’ai vu des gens qui bien loin de
planer à quinze mille, après qu’on leur a dit que de nouveaux avions allaient
leur tomber sur la tête, ont mis en commun des milles et des milles,[9]

 

J’ai lu des journalistes qui
n’avaient pas oublié d’être cons après que l’on a fêté les vingt ans de la mort
de Desproges à l’humour si fécond, [10]

J’ai finalement vu des gens un
peu partout, alors que tout part, se fier à ce à quoi il était possible voire
même impossible – l’homme ayant cette manie de se raccrocher bien souvent à
quelque chose d’impossible car justement en dehors de cette réalité dont il
veut s’extraire –, se raccrocher  à un
fil qui menaçait lui aussi de céder – mais qu’importe – saisir la branche qui
se présentait à eux, s’élancer comme ils le pouvaient, dans une course – non
plus effrénée car maintenant que la preuve mondiale est là, on ne peut
l’ignorer – vers une montre qui n’existe pas vraiment, vers une montre d’une
existence qui plus que jamais ne tourne plus dans le sens des aiguilles mais
dont on tente de retrouver la trace dans la botte de foin du monde. 

 

 

Mardi 20 janvier 2009


[1] Oui,
le couple (dont la femme travaille dans le prêt-à-porter) chez qui j’habite à
Bordeaux tentent de s’accrocher à je ne sais quel espoir pour ces soldes,
malgré des débuts plus que poussifs…

[2]
d’autant que la nouveauté n’est qu’en ce fait-là, Obama sera un de ces faucons
de gauche qui interviendra sur toute la planète, non seulement pour les
intérêts de la nation américaine mais pour des valeurs, des principes
démocratiques, mais donc toujours dans l’hégémonisme américain…

[3]
J’essaye d’y croire encore même si la comédie de Master que je suis en ce
moment me dit que la seule voie de la connaissance est la sienne propre…

[4]
Merveilleux film, les trois singes,
de Nuri Bilge Ceylan avec une photographie splendide.

[5] La
belle alliance des verts, des amis de Bové, des anciens de Greenpeace (Yannick
Jadot tout du moins) et des amis de Hulot pour les élections européennes.

[6]
Très  beau spectacle que cet Ali, de la compagnie MPTA.

[7] Eh
oui Zinzin et Julian ça fait toujours plaisir de se croiser sur le quai d’une
gare ou aux abords d’une boite e-mail…

[8] merci
Mathilde pour ces appels toujours sans queue ni tête, mais qui remémorent ces
instants de colloc’ strasbourgeoise…

[9] des
citoyens anglais qui ont décidé de se porter acquéreur de terrains devant
servir à la construction d’une troisième piste à Hearthrow…

[10] je
pensais notamment aux petites brèves d’Hervé le Tellier du Monde qui ne se gêne
pas de rire avec la guerre et se demande  « Combien
faut-il de militants du Hamas pour changer une ampoule ? Deux : un pour tirer
la roquette, un pour crier Allah Akhbar. Ah, l’ampoule ? A quoi bon, il n’y a
plus de courant à Gaza.
 ». Ces petites brèves pour ceux qui les
cherche ne sont disponibles que pour les abonnés du monde.fr…

La distance

La distance

 

 

Histoire de se faire
la main,

Se faire la malle sur
le fil

De la maille qui se
défile

Loin des ouailles du
commun.

 

Prendre la poudre
d’escampette,

Coudre dans sa bouche
la clé des champs

Goûter au métal en
fusion en se cachant

Au fond de sa glotte,
les papilles faisant trempette.

 

On y goutte à goutte
de salive,

Qui s’élève et nous
enivre.

On y bout à bout
d’une livre,

De parfums qui
s’ébrouent et nous enjolive.

 

Pour ensuite
reprendre la fuite,

Répandre sur la suie
des murs,

Une couche d’émulsion
de bromure,

De ces émotions
désormais cuites.

 

On ne pourrait en
être aux arrêts

Comme un mouvement
infini,

Un cycle à l’orbite
indéfinie

Aux abois d’une
circularité acérée.

 

Alors dans la course
pour fuite,

Le nectar à la saveur
qui s’évapore

Et ne trouvera que
comme seul port

Les wagons fluides
d’un grand huit,

 

On peut tenter de se
dire citoyen.

Si un toit ce n’est
plus rien,

Dans un monde aérien,

Il est encore temps
de se sentir mitoyen.

 

Mitoyenneté à
doucement mitonner

Pour savoir faire
revenir à temps,

Ce qui mieux se marie
en sentant

Les doux parfums sans
même détonner.

 

samedi 27 décembre 2008