fables modernes #39 : la lune, les lunettes et les starlettes
Siégeant sur le front juvénile et vermeil,
Insouciante, la paire de lunette de soleil,
N’avait trouvé utilité sous le ciel sombre
Et aurait-elle mieux fait de rester dans l’ombre.
Seulement sa starlette de propriétaire,
Qui, de l’esprit du temps était tributaire,
Préférait chausser ses précieux verres fumés,
Venant siéger sur son cerveau présumé,
Quelque soit de la météo les circonstances,
Pour ainsi toujours se donner contenance.
Abritant si souvent son regard, non de la lumière,
Car, que celle-ci la toucha en était-elle fière,
Mais d’un monde qu’elle, souvent, honnit,
Pour demeurer en son hautaine cosmogonie.
Bientôt sa peau toute pomponnée se vit éclairée
De quelques rayons sur Terre venus errer,
Faisant, réflexe pavlovien, glisser du front aux yeux,
Le paravent des lucarnes de l’âme, le volet soyeux.
Ainsi équipée pouvait-elle arpenter les trottoirs
Tout en demeurant en son propre promontoire.
Perchée tout autant sur ses petits talons
Que l’aurait été un cavalier sur son étalon,
Elle passait sans ne rien voir de ce qui l’entoure,
Tandis que tous se fixaient sur ses atours.
Lointaine et distante, seuls les yeux la télescopent,
L’observant pour quelques images en kaléidoscope.
Souvent n’aperçoit-on que le dessin d’une courbe,
Une cambrure fuyante pour les esprits fourbes.
Parfois, fugace, comme passant dans la brume,
Elle s’éclipse, hostie sombrant dans l’écume.
Il n’est temps que d’une promenade nocturne,
Pour qu’elle s’en retourne dans sa turne.
Si la lune trône dans les sombres cieux,
Les lunettes aux tempes, signe facétieux,
Abritent de la lumière, quelle qu’en soit la saison,
Ces êtres fiers pour lesquels certains tombent en pamoison.