Archive pour mars 2008

mordre à l’hameçon

Mordre à l’hameçon.

 

Dans le creux de ton
cœur

Des chœurs de
pulsations

Qui envahissent
toutes les heures

Dans l’échos d’un
sondeur de sensations.

 

On pourrait doucement

Sans l’ombre de
jérémiades

Se laisser glisser au
firmament

Et lancer à la vie
quelques œillades.

 

On aurait seulement
le doux frisson

Qu’en frisant d’une
ensemble fusion

De se dresser les
cheveux du hérisson

En guise de
permanente à la vie en dérision.

 

Un rien aurait pu
virevolter

D’un envol soudain qui
dérive

Pour se retrouver en
plein cœur de l’été

Au ras des pissenlits
qui nous rivent.

 

Il n’aurait pas fallu
plus

Juste le sourire
qu’il nous faut

Pour se retrouver à
la droite de Vénus

Sans plus pour tomber
dans le faux.

 

Dans un élan de
fumerolle

Doucement torsadée et
fugace

Comme une délectation
sans formol

On oublierait tout ce
qui escagasse.

 

Il aurait pu nous
tomber

De sommeil, par mille
façons,

Des averses toutes
d’espoir nimbées,

On aurait à tout coup
mordu à l’hameçon.

samedi 15 mars 2008 

des termes à déterminer

Otage toi-même

 

Encore hier,
je suis tombé sur ce titre aguicheur «  la Meuse prise en otage »[1]. Ne
me demandez pas de quoi il s’agit, je n’ai pas lu l’article. Mais toujours
est-il que cette manie de mettre tout le monde en otage commence à me pomper
l’air (comme auraient dit les Shadocks prompt à pomper tout ce qui passe près
d’eux de l’air à l’essence, l’essence des choses, j’entends). Non, je ne suis
pas là pour faire un pamphlet humanitaire, du genre « j’accuse », du genre à défendre la veuve et l’orphelin ( je
préfère par ailleurs « défendre la
veuve contre l’orphelin
 »comme le disait Desproges), je ne veux pas
lire la lettre de Guy Mocquet pour émouvoir jusqu’au larme en faisant resurgir
à la mémoire le sacrifice d’un enfant pour la patrie, je ne veux pas faire une
chanson sur Ingrid (qui conserve la première position au top 50 des otages
depuis maintenant 6 ans, record de longévité que même Florence Aubenas n’a pas
réussi à dépasser), je ne vais pas lancé un appel ( ni même un javelot) depuis
Londres ou ailleurs, non rien de tout cela, comme l’aurait dit Desproges
(encore…) « je suis un artiste
dégagé
 ». Non, je ne suis là que pour défendre l’art, que pour
défendre la littérature précisément, ou pour être exact la langue française[2]. Oui,
ce mot employé à tue-tête me gonfle grave comme disaient les frères
Montgolfier. Je ne pense pas qu’il se soit passé quelque chose de bien
important dans la Meuse ces dernier jour (comme tout le reste de l’année par
ailleurs…), je ne pense pas qu’il y ait eu à proprement parler d’otages,
puisqu’il est justement question de cela : de parler proprement : oui
pendant longtemps, on a parlé aseptisé, on a parlé désinfecté, on a parlé
épuré, on a parlé purifié, on a parlé assaini. Oui a parlé personne de petite
taille, on a parlé personne non-voyante, on a parlé personne de couleur, on a
parlé technicienne de surface, on a parlé stock option[3], on a
parlé frontière pour le nuage de Tchernobyl, on a parlé de quelques morts au
Rwanda, on a parlé frappe chirurgicale, on a parlé « 0 mort », on a
parlé progrès technique, on a parlé euphémisme. On a décidé qu’on pouvait
appeler un chat, un chien. On a rassuré alors tout le monde, on a calmé, on a
lissé, on a gommé, on a sérénisé. La guerre un problème ? non plus avec
nous. Les écarts de salaire entre grands patrons et smicards ? non ça n’existe
plus. Tout est bien dans le meilleur des mondes.

 

Mais voilà,
les mots, ça va, ça vient, c’est un peu comme la mode, comme le top 50, comme
les recettes de saison, les mirabelles des Vosges, Miss France (des fois plus
rapidement que prévu quand elle se décide à tomber l’écharpe mortuaire pour
retourner à la vie en tombant justement plus que l’écharpe…), les nouvelles
stars et autres victimes de la fameuse sentence du quart d’heure de gloire d’Andy
Warhol, enfin bref comme tout ce que vous voulez qui constitue ce bas-monde où
la vie s’allonge mais l’instant diminue. Oui, aujourd’hui l’heure est au
franc-parler ( sur France Inter, le lundi à 19H30), l’heure est à la franchise,
l’heure est à la coupe de la langue de bois, l’heure est à la transparence, l’heure
est à la vérité, l’heure est au langage bourru, au langage « d’homme à homme » (comme le dit
notre ancien premier ministre un peu bossu sur les bords), au langage du cru,
au langage trivial. Je ne reparlerais pas de ces fameux mots du salon de
l’agriculture illustrant pourtant cette parfaite volonté de se mettre au niveau
du peuple (faculté de la part de notre président dont je doutais pourtant, à
voir le style de vie, les vacances et tout le reste…), chose que
malheureusement nous n’attendons pas d’un président (surtout pas en terme de
langage)[4]. Non,
je voulais revenir à cette fameuse manchette « la Meuse prise en otage » : de vouloir parler cru, de
vouloir de nouveau dramatiser le langage, de vouloir lui redonner une fonction
émotionnelle, on en devient perdu : il y a quelques années, dans la
période euphémisante, on aurait sans doute qualifié un véritable otage en
Colombie de touriste égaré ou de touriste ayant fait des rencontres
intéressantes, qui ouvrent l’esprit. Mais aujourd’hui, le terme d’otage a été
galvaudé et s’utilise à des niveaux bien inférieurs : le cours du kilo
d’otage a bien baissé depuis : un temps il fut autour du patron séquestré
par ses ouvriers, pendant longtemps, il a été au niveau des travailleurs bloqué
par la SNCF ou la RATP mais il poursuit sa descente vertigineuse. Bientôt, il
sera sans doute au niveau du mec bloqué dans l’ascenseur[5], ou
peut-être même du piéton en train de traverser et obligé d’attendre au milieu
du boulevard parce que le feu est passé au rouge. Mais où s’arrêtera le cours
de l’otage ? parce qu’il y a des limites à l’emploi des mots. Les mots au-delà
de leur simple assemblage de lettres réfèrent à certaines choses, à certaines
situation, à certaines notions. Ainsi à utiliser à toutes les sauces le
signifiant «otage» on en vient à transformer le signifié : à utiliser le
mot « otage » on a vient à changer le concept qu’il y a derrière le
mot. Le terme d’otage reflète une situation extrêmement difficile et ne peut
être appliquée à la fois à Ingrid Bétancourt (vivant réellement dans une
situation très délicate) et aux usagers des transports publics. Un même mot ne
peut décrire ces deux situations. Oui le langage sert à exprimer des émotions,
à dramatiser parfois, à surenchérir aussi, à vivre, à exprimer tout ce qui fait
la vie, oui il faut dépasser cette période euphémissime où l’euphémisme était à
son paroxysme (temps en rien plus faste qu’aujourd’hui en terme d’adéquation
signifiant/signifié), mais la langue repose sur une convention sociale qui fait
que derrière un signifiant, il y a un certain signifié, que derrière un
« chat » il y a un chat et que derrière un « chien », il y
a un chien…

 

PS : en droite ligne de ce
qui précède, je rappelle mon plus grand soutien au néologisme explicité, un des
plus grand remède aux déviations sémiologiques, permettant d’utiliser des
termes parfaitement adaptés à la pensée de l’auteur (étant donc auteur des
pensées et des mots traduisant ses pensées) tout en étant compréhensibles aux
lecteurs par un effort d’explication (même si parfois la compréhension peut
être très instinctive et intuitive).

 

Vendredi
14 mars 2008.



[1] Un de ces gratuits, je ne
sais plus, « Metro » ou « 20 minutes ».

[2] oui, en fait aucune
velléité artistique, juste une envie de défendre la langue et la société (non,
je ne plaisante pas, mais vous allez comprendre par la suite…)

[3] Pour ne pas dire
« dividendes de bâtard »…

[4] représenter ne veut pas
dire ressembler.

[5] dans ce cas, je pense que
le preneur d’otage serait Otis, ou toute autre compagnie d’assurance…