Archive pour avril 2010

vie brève, brèves de vie

mardi 27 avril :

Il est étrange que lorsque la mélancolie me gagne viennent fleurir les pensées de contrées lointaines. On aurait coutume de penser qu’afin de rompre avec cet état de léthargie des envies, cette situation de coma des caprices, cette apathie de l’appétence, nos sens se tourneraient vers des sensations familières à-même de nous rassurer et nous réconforter. Mais bien souvent nous nous retrouvons plongé dans une fuite vers l’ailleurs plus ou moins connu qui nous plonge dans le bain du lointain. Il faut soigner le mal par le mal. Si l’envie nous fait défaut, rêvons de Pavie. Si le désir se fait la malle, représentons-nous sous le ciel bleu de Cancale. Si l’on est atteint de neurasthénie, voyageons vers la Scandinavie. C’est d’ailleurs généralement mon cas et pas plus tard que ce soir. Dans une atmosphère intérieure morose mais pas au point de me jeter dans un film à l’eau de rose pour guérir le cœur et ses ecchymoses, c’est un doux parfum de Finlande qui souffle dans mes naseaux. Étrangement, elle ne me semble pas fictive cette senteur. La fenêtre ouverte exhale ce délicat parfum du bois de sauna. Précisément le bois sur lequel l’on est assis dans le sauna, non celui que l’on fait brûler. Et la nuance est de taille. Le bois qui brûle pour faire fonctionner le sauna libère une senteur forte, particulièrement odorante, elle prend à la gorge lorsque l’on ouvre le foyer, elle dégages les narines aussi puissamment qu’une dizaine de dragées mentholées et mâchouillées, au nom des lettres de la colline6. Le bois sur lequel l’on s’assied, comme un patch pour l’arrêt de la cigarette, dispatche son odeur de manière plus diffuse. L’odeur est plutôt celle du bois humide, rehaussé par la chaleur du sauna. Donc assez curieusement, cette pensée olfactive me rassure. Est-ce parce qu’il s’agit d’une pensée de sauna, lieu d’apaisement par excellence ? Est-ce parce qu’il s’agit d’une pensée de Finlande, pays d’apaisement par excellence ? Est-ce parce qu’il s’agit d’une pensée de voyage, moment d’apaisement par excellence ? Ou est-ce tout simplement parce qu’en imaginant l’ailleurs, on rêve un ici meilleur ? évider la raison, iriser la vision, et vas-y l’évasion !

lettre ouverte à la SNCF

Je suis et resterai un fervent défenseur du service public, notamment ferroviaire. Cela ne m’en fait pas un être aveuglé par ce simple idéal, incapable de formuler aucune critique à son endroit. Même s’il ne s’agit là que d’un épiphénomène, je me permets cette lettre ouverte au centre Régularité de la SNCF. Car si je peux accepter et comprendre des erreurs matériels et/ou humaines engendrant des retards, je ne peux souffrir qu’on se paye ma tête. C’est notamment l’impression du dernier courrier reçu de notre société nationale des chemins de fer français suite au dernier retard dont j’ai été victime (une erreur d’aiguillage rendant impossible mon arrêt prévu en gare de Saint-Pierre-Des-Corps, incident qui s’est conclu par un arrêt en gare de Vendôme avant d’être rapatrié par un autre train en Touraine). Voici donc une lettre que je m’apprête à adresser à la SNCF ainsi que la lettre qu’elle m’a fait parvenir il y a quelques jours.


Monsieur Etoile,


    Je vous remercie pour votre chaleureux courrier en date du 9 avril 2010. Je tenais avant tout à louer votre connaissance très particulière et personnelle des trajets effectués par chacun de vos clients, leurs délais et leurs éventuels retards. Je ne sais comment vous arrivez à emprunter le parcours de chacun des usagers de la SNCF tout en effectuant votre travail de responsable du Centre Régularité, mais il s’agit d’une prouesse qui doit être portée à votre crédit. Lors de mon prochain voyage sur les rails, je demanderais au chef de train à vous rencontrer et vous remercier de tout ce suivi rigoureux des passagers des trains SNCF.

    Vous disposez ainsi d’une connaissance très précise de nos temps de trajet, car après m’avoir rappelé que pour bénéficier d’une compensation en cas de retard le dit-retard doit être au moins de trente minutes, vous m’affirmez bien que cela n’a pas été mon cas, attestant d’une connaissance donc très aiguë des voyages de chacun des passagers. Suivant nos trajets à la trace, je ne doute pas de la véracité de cette assertion. J’aimerais donc seulement pouvoir mieux comprendre cette allégation et notamment connaitre le moment à partir duquel vous comptez cette durée de retard. Car pour avoir effectué ce trajet et réalisé le calcul par mes propres moyens – sans doute bien rudimentaires à côté des vôtres – mon arrivée a été retardée de deux heures suite à une erreur d’aiguillage. Le train que j’empruntais devait s’arrêter en gare de Saint-Pierre-Des-Corps, ma gare d’arrivée mais suite à la susnommée erreur, le train ne put faire halte dans la cité des Corpopétrussiens et dû se délester des passagers qui souhaitaient y descendre en gare de Vendôme dans l’attente d’un train venant dans l’autre sens, autrement dit de Paris afin qu’il nous fut permis de descendre dans la banlieue tourangelle. L’ensemble de ces allées et venues ferroviaires m’a donc fait arriver, selon mon calcul, deux heures après l’horaire initialement prévu.

    Mais comme vous avez une connaissance particulièrement précise de mon retard, je voulais savoir la manière dont j’aurais du effectuer le calcul pour arriver à un résultat inférieur à trente minutes. Comme tout homme pressé de ce bas-monde, j’eus le sentiment d’avoir perdu du temps ce jour-là en prenant le train. Si je pouvais comprendre comment vous effectuez votre calcul et arrivez à un retard de moins de trente minutes, je me sentirais mieux dans mes baskets en pensant avoir perdu bien moins du quart de ce que je croyais. Je vous remercie donc de bien vouloir m’aiguiller sur la méthode calcul alors utilisée.

    Dans l’attente d’une réponse de votre part, je vous prie de recevoir, Monsieur, l’expression de mon plus profond mécontentement.


Monsieur,


Vous avez adressé votre billet au Centre Régularité de Toulouse pour obtenir une compensation de la SNCF.


Je tiens tout d’abord à vous présenter les plus vives excuses de la SNCF pour les difficultés que vous avez rencontrées au cours de ce voyage du fait de ce retard.
J’ai le regret de vous informer qu’il n’est pas possible de donner une suite favorable à votre demande.

En effet pour bénéficier de cet engagement, le train Grandes Lignes emprunté doit arriver à destination avec un retard d’au moins 30 minutes. Tel n’a pas été votre cas.

Vous voudrez donc bien trouver ci-joint en retour votre billet.

Je renouvelle toutes les excuses de la SNCF et vous prie de croire, Monsieur, à l’assurance de ma considération distinguée.

Le responsable du Centre Régularité de Toulouse.

Paul ETOILE

vie brève, brève de vie

lundi 26 avril :

Les parenthèses dans lesquels on met beaucoup de choses ont ceci de particulier qu’elles font oublier le reste de la phrase. Soit elles auraient dû être réduites à des choses de portée plus minime soit elles auraient dû se constituer en phrase autonome et indépendante, dotée d’une souveraineté que ses consœurs auraient bien volontiers acceptée (la diplomatie syntaxique disposant pour seule règle implicite, celle du maintien de la cohésion du système syntaxique global). Le problème reste que l’on ne sait rarement si tel propos sera minime et de l’ordre de la parenthèse ou s’il est déjà primordial. La suite du récit peut aussi faire que l’on est contraint de mettre des propos, d’abord jugés importants, entre parenthèse car le cours du récit, en quelques sortes l’exige. On se retrouve ainsi dans une certaine incongruité syntaxique, comme un éléphant dans un magasin de porcelaine…