Archive pour avril 2011

sur le vif #3 : les oiseaux sont des cons

    Chaval avait raison : «les oiseaux sont des cons». J’en ai vu un l’autre jour qui lui rendait un vibrant hommage dans son plus grand entêtement illusoire. Peut-être est-ce l’entêtement de toute forme vivante face à l’adversité et l’arbitraire de la vie. Celui-ci manifestait quoiqu’il en soit une forme aigüe de détermination pour la stupidité du monde. Profitant d’une porte ouverte et de ses ailes, il s’était installé tranquillement au sein d’un de ces espaces modernes où les murs à défaut d’avoir des oreilles sont transparents. Un espace vitré, si vous préférez. Il trônait bien fièrement sur une pile du canard du matin qui n’allait pas tarder à se retrouver entre toutes les mains étudiantes qui passeraient en ce lieu qui leur est normalement destiné 8. Venant à passer à proximité du volatile, je ne m’inquiétais pas outre mesure de sa présence ici, ne souffrant pas de syndrome post-hitchkockien faisant craindre pour la sûreté de sa vie en cas de proximité avérée avec un ou plusieurs représentants de la classe des Aves. Je notais seulement l’incongruité de sa présence, essayant de ne pas songer à la suite qui allait inéluctablement arriver, au tragique à venir, n’osant concevoir même en esprit ce qui allait advenir. Je le saluais donc d’un regard souriant – n’étant pas ornithophobe, je préfère néanmoins me montrer jovial avec les volatiles urbains – avant de passer mon chemin. Je ne saurais su dire s’il me vit véritablement. Le regard de l’oiseau a ceci de commun avec celui du bovin qu’est sa formidable expressivité de vacuité. Le bovin dispose néanmoins d’un avantage de taille sur son très éloigné cousin piaf, qui est justement la grosseur de ses orbites pouvant magnifier à merveille la vacuité de la vie. Ainsi donc, ce pigeon – car il faudrait bien le dénommer comme il se doit – aperçut sans nul doute ma silhouette gracile passer à quelques pas de lui avant de dépasser quelques tables pour rejoindre des escaliers malicieusement créés pour monter à l’étage. Je ne saurais dire quel fût le signal déclencheur pour le volatile pour lui indiquer de prendre son envol – si seulement lui-même pouvait le savoir ! – mais de battre, son coeur fit battre ses ailes. Néanmoins, sa tête de piaf fit vite «paf». Trop petite, sa tête n’avait pas conçu la vitre comme une barrière insurmontable. Mais là où le bébé humain, le singe ou le stagiaire surexploité apprennent de leurs erreurs pour ne plus jamais, ô grand jamais, la reproduire, lui rééditait son erreur d’appréciation de l’environnement et se jetait de nouveau à l’assaut de la glace. Toujours en vain. Il essaya même en d’autres endroits de la surface vitrée peut-être dans l’espoir que des aérations invisibles aient été ménagées dans cette opacité de verre. Mais il en n’était rien et la paroi était aussi close que la maison. Sans doute dépité par ces échecs répétés, l’oiseau repris sa station assise sur les journaux. Il est fort à parier qu’il ne cherchait pas ainsi à prendre du recul afin de mieux analyser la situation, mais uniquement à prendre du recul afin de mieux lancer sa fronde et son corps contre le pouvoir du verre. Envers et contre tous, il se dépasserait et dépasserait même cette muraille.

Ébahi par cette persévérance, il ne me semblait pas concevable de ne pas venir porter secours à la bestiole. Cette dernière avait repris son envol pour s’attaquer à une autre paroi. Tel un alpiniste qui, selon la difficulté, sait varier les parois d’accès aux plus hauts sommets du globe, l’oiseau sait aussi varier les parois par lesquelles se faire rembarrer. Il avait néanmoins choisi là, l’accès le plus difficile, s’éloignant de la porte toute aussi transparente que les parois mais ouverte. Je me précipitais en bas, courant, sautant, presque m’envolant dans l’entrain qui m’habitait à venir secourir la bête en perdition pour tenter un appel d’air en ouvrant une porte supplémentaire, à proximité de l’actuelle localisation de la bête. Pestant véhémentement contre cette porte qui refusait sous mes doigts adroits de me laisser l’accès à l’air libre, je contemplais mon pigeon qui s’évertuait à contredire les lois de la nature dans ce qu’elles ont de plus cloisonnant. Il est bien vrai qu’il n’y a que les fleurs et les légumes qui n’ont à ce jour pas manifesté d’hostilité pour tout ce qui ressemble de près ou de loin à une serre. Ce pigeon-ci semble être à l’avant-garde de la lutte, révolutionnaire éclairé, pionnier du combat, maquisard invétéré, kamikaze convaincu, il se battra seul bec et ongles pour faire tomber le verre.

Obtenant enfin un résultat favorable à mon acharnement sur le loquet de la porte, je parviens à faire communiquer l’intérieur et l’extérieur comme le veut l’usage des portes-fenêtres. Il ne reste plus qu’à indiquer la marche à suivre – ou plus exactement le vol à suivre – à notre ami pigeon tout en tenant la porte ouverte celle-ci, comme le militant d’extrême-droite ou l’huitre, ayant la fâcheuse tendance naturelle à se refermer du monde. L’ouverture ne semble pas lui avoir caressé les plumes car il poursuit son travail de sape contre la glace. L’agent d’entretien des lieux ne semble pas marquer une envie irrépressible de me venir en aide et redonner le goût des nuages au volatile. Immobile au fond du couloir, il observe ce drôle de manège. Il faudra l’intervention d’un étudiant pour faire comprendre à la bornée bestiole comment retrouver ses congénères à l’air libre, lui pressant l’arrière-train d’un pas ferme et alerte. J’ai conscience en écrivant ces quelques lignes d’avoir brisé une vie, une vocation, celle d’un trublion de pigeon qui pensait pouvoir faire bouger les lignes du verre.

8 Mais les étudiants aussi sont des cons, ignorants pour bon nombre d’entre eux l’existence d’un pareil endroit – si l’on ne considère bien entendu que les étudiants potentiellement concernés, à savoir ceux de l’université en question.

sur le vif #2 : l’auto-immobile

     Week-end pascal oblige, les voitures se pressent aux portillons et portes de la ville, pour en sortir. Les fauves sont lâchés et les conducteurs font rugir les moteurs. Rugir, certes, mais c’est surtout l’impression de lions en cage qui domine, car mimétisme oblige, un goulet d’étranglement s’est vite créé autour de la ville et dans les pots d’échappement qui, dans l’immobilisme, semblent souffrir d’une quinte de toux. Si les embouteillages sont monnaie courante dans la cité girondine en fin de journée et à plus forte raison le vendredi, l’appel de l’air frais et libre des week-end entraine quelques rejets supplémentaires d’air à forte teneur en produits polluants. Dans la cité du vin, avec du cidre, on mettrait Bordeaux hors-bouteille. En attendant, comme disent les connaisseurs, ça sent le bouchon. Malgré tout, quand le vin est tiré, il faut le boire. Même s’il faut patienter avant de laisser pouvoir s’échapper la joie des petites filles qui déjà trépignent à l’arrière du break familial et ne pourront véritablement laisser exploser leur allégresse qu’à la vue de la plage sableuse. Mais est-ce la supposée douceur de vie girondine, la tempérance du tempérament local, on ne joue du klaxon ici pas plus que Beethoven n’usait de l’accordéon dans ses sonates. Peut-être est-ce une forme de résignation, comme si les bordelais avaient pris acte de l’engorgement urbain, surtout lorsque l’on souhaite justement s’extraire de l’urbain. Pour preuve que la quiétude règne dans les encombrements urbains, cette voiture lancée à toute allure vers le carrefour qui ne fait que presser la pédale du frein sans même presser l’avertisseur sonore alors qu’une jeune féline se permet un pied de nez au bonhomme en rouge réglementant le passage des piétons. A moins qu’il ne s’agisse là que d’un comportement marqué par la pire galanterie, celle qui engendrerait un comportement différentiel vis-à-vis d’une jolie jeune femme pour la seule et unique raison qu’il s’agit d’une jolie jeune femme, ce qui supposerait qu’en pareille situation, avec un petit vieux rabougri, la corne de brume automobile aurait résonné à de nombreuses reprises, avec quelques agréments vocaux rappelant l’inconscience du-dit petit vieux rabougri.

       Peut-être est-ce l’héritage anglais qui joue-là en la faveur des bordelais, comme si, en terre gauloise où l’impétuosité est si souvent de mise, il résistait encore et toujours à l’envahisseur un village anglais… Peut-être qu’en ce sens, on peut parler d’art de vivre bordelais. Peut-être est-ce une influence plus lointaine – tant temporellement que géographiquement – d’une de ces régions caucasiennes où chaque démarche administrative s’accompagne du partage de la tasse de thé, comme si au-delà de rendre service, on souhaitait également se rendre quelques amabilités. Quoiqu’il en soit, cédant comme tout un chacun à l’appel d’air du bel air de l’été, les bordelais manifestent leur frugalité de l’air pur avec tempérance. A moins qu’il ne s’agisse de quelques relents pascaux qui flottent au-dessus de la ville, faisant passer l’envie d’envenimer d’une manière ou d’une autre les relations avec les congénères automobilistes.

Pour ma part, ma monture à deux roues flirte avec la carrosserie, filant presque libre comme l’air entre les véhicules immobilisés sur la chaussée. Je dépasse presque avec aise toutes ces automobiles, moi qui ne vais pas au bord de mer, juste l’histoire de quelques emplettes de seconde main. Alors je flâne avec un flegme presque british, je me laisse pousser par les courants d’air, je me laisse doucement descendre des différents monticules que mon véhicule rencontre. Ainsi à la descente du ralentisseur, je suis saisi par une vive bouffée florale, pas de celle dont on rend la gomme machouillarde plus agréable au palais, pas non plus de celle dont on rend les lieux de l’intime plus universels et décents, ni même de celle encartonnée sous la forme d’un conifère qui n’en a rien à faire mais placée dans l’habitacle de nombreux véhicules, non une véritable bouffée parfumée et glycinisée me saisit dans l’ivresse de la descente du ralentisseur. Les descentes de trottoir sont bien plus piègeuses et dangereuses, ravivant le sentiment d’aventure de tout voyage à vélo qu’il soit aux Pays-Bas au Cap Nord ou à Bordeaux. La descente de la route, qui, épousant le relief de la croûte terrestre, nous fait dévaler quelques mètres de dénivelé me saisit de toute puissance et concomitamment de légèreté. Sentiment de fuite, d’échappement au monde, heureusement que les pots sont là pour me ramener à l’âpreté de la réalité.

Bleu marine

On s’était habitué aux difficultés chromatiques des votants. Les cols blancs se plongeant dans le bleu azur de la droite républicaine, Les cols bleus votant pour des rouges, on avait su assimiler les couleurs et y déceler une véritable harmonie. Avec l’arrivée du bleu Marine, bien évidemment, la tentation était trop grande d’enfin trouver une cohérence chromatique parfaite. Mais, pourtant pas question de daltonisme, notamment, chez les classes populaires. C’est surtout qu’elle en fait voir de toutes les couleurs la Marine. Si son père affichait la couleur, elle, choisit le sfumato pour mieux nous enfumer. Jouant de toute la palette, elle en dresse un drôle de tableau de la France. Mais sous couleur de défendre les couleurs du peuple, elle en promet des vertes et des pas mûres et elle n’en demeure pas moins sélective dans ses pigments de prédilections pour privilégier la couleur locale. Si le bleu Marine nous attire dans ses flots, ce n’est au final que pour nous déposer décharné sur la terre brune, comme le sort qui sera réservé à tous ceux qui auraient, d’après elle et ses acolytes, les mauvais pigments dans leur épiderme.
La couleur du temps n’est décidément pas à la couleur. Espérons néanmoins que, de Marine, nous n’en verrons pas la couleur, le brun, à fuir à tous crins.

sur le vif #1

L’herbe verte et florissante exerce un immense pouvoir d’attraction sur les corps amoureux. Tout corps amoureux plongé dans une clairière s’y affale. Un corps dual car si les amoureux font coeur commun, ils conservent leur propre corps, en dépit de leur tentative de fusion. Certes l’herbe verte printanière attire d’autres corps allant du lecteur nonchalant à l’alcoolique bucolique en passant par les mouches et autres volatiles de petites tailles sans oublier les mammifères à l’instar des lapins ou des écureuils, ces derniers ne faisant d’ailleurs souvent que traverser ces tapis verts, ne préférant pas miser une noisette sur une douce sieste profitable et inclinant plutôt pour retourner faire fructifier leurs réserves bien sécurisées auprès d’un arbre.

Mais ce sont bien les amoureux qui ont la primeur du printemps enherbé. Car il faut bien replacer cette pratique dans son contexte : cette activité est saisonnière et précisément printanière. Il ne faut pas se jeter trop tôt dans les bras des brins d’herbe car pour peu que l’hygrométrie ait été importante et ce sera dans un bain de boue que les amoureux plongeront. Or, si le bain de boue ne leur est pas en soi une pratique réprimée, elle doit se restreindre au cadre particulier du spa ou du centre de relaxation, où il est socialement admis le délassement dans le réprouvé mélange d’eau et de terre. En dépit de tous les courants d’écologie politique, on ne pratique plus le bain de boue dans la nature. Il ne faudrait pas non plus se vautrer sur le sol laissé en jachère trop tardivement dans l’année. Ce ne serait alors plus que poussière et terre asséchée que l’on rencontrerait. Outre le confort que l’on y perd alors, c’est surtout la texture qui nous manque. Il faut néanmoins prendre garde aux jachères trop prononcées où les rencontres avec le règne animal le plus venimeux pourrait bien vite être fatal aux Eve et Adam des temps modernes.

Il se trouve ainsi que l’attraction à l’herbe verte est plus importante lorsque celle-ci, rase et bien entretenue, rentre dans l’écrin urbain d’un parc public, d’une pelouse laissée à la liberté des passants à proximité de bâtiments publics, voire dans son propre jardin pour les mieux dotés de notre société, même si cette dernière version supprime toute la vertu ostentatoire de la pratique. Du fait de la rareté de l’herbe verte subissant une taille régulière – comme les canons de la mode, l’herbe suit les diktats de la minceur de notre société qui aime qu’aucun brin ne dépasse – les espaces disposant de ces atouts sont forts rares. Leur pouvoir d’attraction n’en est que renforcé aboutissant à une concentration des corps amoureux, qui, dans leur tendance fusionnelle, ne se soucient guère de ce comportement grégaire. Si leur intimité leur est aussi essentielle que l’huile, la pression sociale ne leur empêche d’extraire les plus fins parfums de l’huile. Ils retrouvent leur intimité partout où ils se trouvent.

On notera d’ailleurs que l’attraction exercée par l’herbe fraîche va décroissante avec la durée de vie du couple. Sans disposer de corrélations scientifiques sur un large échantillon, on peut raisonnablement subodorer une régression de la mixité entre les corps amoureux et l’herbe le temps passant, les couples plus avancés se contentant justement de passer auprès des espaces herbeux envahis de corps fraîchement fusionnés. Tout au plus les corps amoureux avancés se contenteront d’une brève station assise sur un banc soit pour deviser brièvement le temps de reprendre un souffle perdu par la marche précédente, soit pour justement observer ces corps alanguis poussant comme des marguerites au soleil, eux qui coutumiers des plates-bandes funéraires, s’accoutumaient presque aux sombres chrysanthèmes. La candeur de ces jeunes fleurs leur feront un joli bouquet de mélancolie qui, lentement, se fanera dans les jours qui viendront. Ils auront beau maintenir le niveau de l’eau, irrémédiablement, les souvenirs se faneront. C’est ainsi qu’ils n’ont pas pour coutume de s’arrêter longtemps, bien conscient qu’ils ne pourront maintenir leur moral à flot. L’homme souvent prendra prétexte du journal régional qu’il ne souhaiterait, en ce dimanche – car il s’agit bien souvent d’une promenade dominicale – pour rien au monde manquer ou bien un tri à effectuer dans les factures qui s’accumulent en cette fin de mois. La femme, même si généralement l’argumentation de l’homme se suffira à elle-même, pourra prétexter la cuisine à préparer pour le repas du soir ou, si elle est encore suffisamment coquette, une couleur à faire.

Les couples amoureux n’ont pas ces soucis-là. Leur tête repose en paix, pour l’un directement sur le sol, pour l’autre sur la poitrine de l’ayant-droit de coeur. Un tremblement de terre pourrait se produire, ils s’en ficheraient éperdument. Bien calés, l’un contre l’autre, il ne pourrait pas les déloger de leur position et seul le ciel, leur tombant sur la tête, pourrait les atteindre, même si, occupés à déceler quelques formes reconnaissables dans les nimbus et ainsi nimbés de rêves in naturalibus, ils sont surtout susceptibles de sombrer sous les assauts de la coalition formée par Cupidon et Morphée.

il est d’étranges soirs

Il est d’étranges soirs.

À l’heure où sombre le soir
Il se déploie en filament
Les ombres d’espoir
Qui s’emploient au firmament.

Un cycle ici se clôt
Le suivant en puissance,
Saveur qui s’éclôt,
Se fait déjà violence.

Dans la brume éclectique
Se frictionnent les émulsions,
Diffusant leurs parfums électriques
Dans une valse d’infusion.

On bouillonne de l’iode
Odorant le lit de nos muqueuses
Allumant en nous les diodes
Qui lieront les pensées oublieuses.

Un chemin se dessine
Serpentant entre les cimes
Que l’on essaime sans racines,
Comme de possibles rimes.

Il importe peu que la lueur,
Une fois de retour ici-bas,
Apporte toute son ampleur,
Tant que l’on s’y ébat.

Il n’est alors que des images
Qui émergent en chapelet d’îles;
Sous le sable naissent les coquillages
À former de futures idylles.

Doucereuse et suave transe
Qui nimbe les sens en mollesse
Assouplis qu’ils sont sous surveillance
Du sommeil soufflant la faiblesse.

Ce ne sera qu’avec l’assoupissement
Que s’oublieront les promesses,
Que le lendemain et ses atermoiements
Remettront les sens en laisse.

19 février 2011

sous les vagues

Sous les vagues

Dans le ciel ravageur
Le songe du pêcheur
Sous l’égide du destin
Jaillit des fonds indistincts

En cercles papillonnés
La pupille a sillonné
Au parfum du hasard
Le sort du corps rare

Décor de plomb mort
Onde vengeresse qui dort
Au chevet du conquérant
S’il n’est chevalier errant

Les soubresauts du ressac
Balbutiements qui traquent
Les gibiers de l’omnipotence
Les rendant à l’obsolescence

Vaines évasions divines
Des augures qui se devinent
Si tôt la nature s’enfièvre
Nous laissant sans trêve

Rêve d’être de puissance
Qu’il en advienne pour le sens
Le dépit des fulgurances naturelles
Saillies qui viennent saigner le réel

Submergés sous les flots
De la folie pauvres matelots
Matés par la triste marée
En sont-ils désemparés

Il n’en est pas un qui fût
Saisi par les puissances à l’affût
À se voir le corps en convulsion
Convoyé par les flots en fusion.

Du plus profond de l’iris
Se reflète l’hybris
Forge rouillée de nos fers
Que le roulis met en lumière.

dimanche 20 mars 2011.

souvenirs détachés

Souvenirs détachés

Je regarde les voiles
Qui me disent ton visage
Le bord de la fenêtre tisse la toile
À l’ombre des présages.

De loin en loin s’effilochent
Les lignes de ton corps
Vague dessin dans ma poche
Abandonné à son sort.

Il se trame une traîne
D’étreintes que le temps éreinte
Tourne en tumulte les graines
Qui ne donnent que des fleurs éteintes.

Le brouillard mouille ma mémoire
Les fines particules s’imbibent d’images
Perles moites dans une boîte noire
Lambeau de pellicule à l’hommage.

Marchant les souvenirs ballants
Sautillants de flaque en flaque
Ils s’ébrouent les flancs
Pas encore rassasiés de leur traque.

Le passé laisse ses callosités
L’épiderme cache sous les épluchures
Échardes au coin d’anfractuosités
Échauffements aux encoignures.

Parfois une lueur étrange
Souffle l’atmosphère présente
Signal désossé qui montre sa frange
Espiègle draperie susurrante.

Une forme interpelle les sens
Pèle-mêle ils se déforment
Fusionnent le coeur de l’essence
Ce sont les rêves qui dorment.

En fusion les cendres sous le néon
Lumière nouvelle sur les volutes
Affine les événements en tourbillon
Mettant au jour de la vie ses anacoluthes.

Les mots ne badinent pas
Avec l’émoi qui nous imprègne
L’oeil au coeur du compas
La focale obturée saigne.

jeudi 31 mars 2011