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mieux vaut court que jamais #413

J’ai décidé de donner un tournant engagé à mon existence. Me rendant compte de nombreuses composantes m’apparaissant choquantes dans la vie, je ne voyais d’autre alternative que le combat. Deux choses pour commencer : la mort me paraît bien inutile tandis que la naissance semble, par de multiples aspects, être d’une injustice profonde.

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Et la gousse d’ail autour du cou, me fait-on ingénument remarquer ? Mais c’est qu’à défaut de vampires hantant nos rues trop éclairées, je m’en fais mon chewing-gum, ma chique à mâcher, mon goûter quotidien au premier profit de mon sang qui s’en trouve revigoré.

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Implacablement, je n’avais vu d’autres alternatives que celle d’un usage quotidien d’une langue morte, qui, pour des raisons de contexte géographique et de quelques rares souvenirs scolaires, fut celle du latin.

Si cela me rapprochait du sacré et par là de l’éternité face à la lutte sans merci contre la mort, cela en rendait toutefois la commande chez le boucher d’un bon steak bien plus problématique.

mieux vaut court que jamais #323

60 selon les participants, 59 selon les croque-morts.

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Le ciel se sombrant de nuages ne s’accommoderait de ses cendres.

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Le silence sifflait dans le cuivre des trompettes. Des anges de la fresque, à chaque cérémonie, il s’extirpait le chant des songes.

mieux vaut court que jamais #220

Il m’est une commune habitude de m’imaginer ma mort, jouissant de la vision des miens qui me pleurent et me regrettent. Cependant, j’ai bien conscience que ce tableau n’est qu’une représentation, qu’une vision de l’esprit qui ne pourrait en rien s’incarner en ce bas monde.  De fait, il n’y a rien de plus que j’exècre que les gens qui pleurent.

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Le pigeon confit dans son sang au milieu du bitume ne réussit à m’extirper la moindre larme. Son regard vide et implorant dans son dernier souffle ne m’émut pas plus. Quant à ses griffes recourbées et garnies des cailloux de la route, elle ne pouvait pas plus m’attirer de sympathie.

Cette froide ignorance de la mort n’est-elle pas la meilleure arme à notre disposition ?

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Autant de son indifférence profonde à mon égard m’avait toujours vexé, autant le regard fixe d’animal empaillé qu’il me proposait désormais me glaçait les sangs. A choisir, l’indifférence me seyait mieux.

mieux vaut court que jamais #60

« Quand on est mort c’est pour longtemps ». Voilà proverbe que Jésus eut mieux fait de méditer au lieu de ses paraboles dont on reçoit toujours aujourd’hui quelques ondes douteuses, depuis sa mort bel et bien lointaine mais pourtant tellement itérée que l’on doute de sa véracité.

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Le charognard vautour et ses serres acérées vit aux crochets de la mort. Nul doute que Dieu eut ses penchants vicieux lors de la Création. Le tout est de l’assumer.

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Il en est de ceux qui traquent les dernières traces de vie dans les mots d’avant-tombe.

Mon oncle trace les traits tirés des trombines des défunts. D’un croquis, il tire un dernier portrait, esthète croque-mort.

mieux vaut court que jamais #59

Dans les allées du salon de la mort, la mort n’est plus un pis-aller. Elle tient désormais salon.

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Le bobo au fond de son jardin écolo osa lancer un regard au fond de la cuve à compost. Les vers y grouillaient dans un enchevêtrement de matières organiques en décomposition. Il eut un regard de dégoût. Bobo ou pas, l’amas de vers foisonnants, qui nous attend au bout du chemin, est un mortel et peu réjouissant rappel à l’ordre.

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Je prierais la prochaine personne qui aura connaissance du fait qu’un homme vient de trouver la mort, qu’il la localise au plus vite – si possible avec nos moyens modernes de géolocalisation, gagnons en fiabilité – afin que l’on puisse, une bonne fois pour toute, la mettre hors d’état de nuire.

fables modernes #27 : l’abbé et l’abeille

Jadis dans l’abbaye vénérait-on tant l’abeille,
De son miel sang du christ qui émerveille,
Ou de sa piqure telle le Christ-juge,
Que de son culte, on l’aurait faite démiurge.
Dans une de ces ecclésiastes forteresses,
S’était longtemps exercée une tendresse
Pour l’abeille et son doux produit doré
Venant des ruches juchées à l’orée.
Si le moyen-âge avait uni les communautés,
Entre clergé reclus et ruches en solidarité,
La modernité avait tendu les relations
Entre le moine et l’ouvrière de la pollinisation.
Pour ces êtres vivants dans la crainte de Dieu,
L’arrivée de l’abeille tueuse sous leurs cieux,
Symptomatique de manipulations diaboliques,
Faisait aussi courir le risque d’une mort dramatique.
Souvent l’une d’entre elles s’égarait,
Laissant les moines dans l’abbaye s’effarer.
Craignant, hommes vertueux, la sentence du dard,
Ils fuyaient alors dans leur cellule dare-dare. 
Il en arriva une plus courageuse et déterminée,
Sans doute la reine, d’une autre force animée.
Elle fila dans les couloirs et tomba sur l’abbé,
Qui, dans la lumière du coucher qui le nimbait,  
Bayait aux corneilles dans le réfectoire désert,
S’octroyant une pause au cœur de son rosaire.
Sans tergiverser une seule seconde,
Sachant l’endroit où la piqure est féconde,
L’abeille s’engouffra dans le gosier grand ouvert
Et n’eut-elle pas besoin d’aller au diable vauvert,
Pour que le pauvre homme du maléfique venin,
Soit convié au dernier et funeste festin du divin.

 

 

Il est une sombre et détestable époque
Celle où la mort sévit jusque sous le froc.
Mais en fût-il vraiment une où la dévotion
Mit à l’abri de l’aiguillon et sa fatale sanction ?    
Tous ceux qui à ce jour ont trouvé la mort,
N’ont pu l’arrêter et lui faire reconnaître ses torts.