Archive pour mars 2013

fables modernes #108 : les fossiles et les missels

Il n’est plus une commune
Qui, à son héritage ecclésial,
Offre une nouvelle fortune,
Refondant l’édifice paroissial.
Du clocher au tympan,
Du transept au chœur,
Redonnant le flambant
Jusqu’aux intérieurs,
Les rénovations en nombre
Exhibent souvent ici ou là,
Parmi les quelques décombres,
Brillants de mille éclats,
Quelques trésors engloutis
Par les fondations massives,
Bases de l’édifice abouti,
Pour depuis rester passives.
Seulement n’est que relatif,
Le trésor que l’on décèle,
Dont l’équivalent lucratif,
N’excède ce que l’on descelle.
Ainsi de l’église Sainte Radegonde,
Minée de crevasses artificielles, 
Des fondations que l’on sonde,
Ne fut guère providentielle
La découverte qu’alors l’abbé fit,
Investiguant à son tour les tranchées.
Lui rendant le cœur entier déconfit,
Il ne savait même où l’épancher.   
De cette partie où se célébraient
Jadis tous les grands offices,
Recueillît-il tous démembrés,
D’antiques missels de l’édifice. 
Cependant qu’il les ausculte,
Bientôt se rend-il à la raison,
Qu’il s’agit-là d’un autre culte,
Traces de préhistoriques oraisons.
 
 
Il est dans l’aléa de nos quêtes,
Les résultats les plus probants,
Ceux de réaliser des emplettes
Inéluctablement à contre-courant.  

mieux vaut court que jamais #298

J’étais trop MDR, la meuf, elle, elle étais carrément XPTDR. Trop chanmé le rencard. Quand elle parlait, j’étais trop LOL. Elle m’a trop kiffé en plus. Comme j’étais super swagg, c’est normal aussi. En fait j’étais trop frais. Le keum à côté il arrêtait pas de nous mater, carrément dègue, il badait grave le type et du coup il était trop seum. Trop VDM pour lui XD

 ***

Profitant d’un nouveau contexte législatif le territoire de la ZUS, inclus dans le CUCS d’agglomération s’est doté d’une ZFU qui s’intègre parfaitement aux directives du SCOT que le PLU avait lui-même retranscrit. Il ne resterait alors plus qu’à harmoniser le PDU avec cet ensemble de dispositifs pour répondre à tous les objectifs de l’ANRU.

 ***

Rat des villes, rat des champs ;

Déplorable ville et tristes penchants ;

De figures libres en allégories

Qui finissent alors par être taries.

mieux vaut court que jamais #297

Face à cet échantillonnage ornemental de la ville balnéaire de pacotille et de devanture de boutique, tous s’extasiaient du retour du printemps et du farniente que cela leur inspirait. Il n’était que moi, véritable natif du bord de mer pour se sentir méprisé par pareille collection de broutilles sans charmes ni goûts, dont l’enchevêtrement en pareilles circonstances était lui-même une insulte au bon goût de la décoration. L’art de la vitrine n’est guère différent de celui de la lettrine.

***

Sur la longue bande de sable blanc ne se reflétaient, dans cette triste soirée d’hiver, que les néons du Casino de la plage, fade animation, peu amène pour le chaland emmitouflé comme un sibérien pour faire face à la petite brise du bord de mer. Et dire que quelques mois avant, il n’y avait ici pas le moindre grain de sable qui n’était assailli par les lueurs affriolantes des bars et boites de nuit de la saison estivale. Seul l’été sait le mieux relativiser les aigreurs de l’hiver.

 ***

De ses barres d’immeubles imposantes et monstrueuses, le front de mer affichait clairement la couleur et nul ne pouvait se tromper sur les intentions colonisatrices de l’Homme, qui avait fait de cet espace, jadis sauvage, une terre humainement appropriée et civilisée. Pourtant, grain après grain, la mouette espiègle, tâchait d’envahir les zones asphaltées, escomptant, qu’au fil des ans, le sable, de nouveau, tout recouvre. Il n’était cependant pour l’heure, que le tapis de ma voiture qui faisait les frais de cette omniprésence progressive du sable sur le bitume.

Collection particulière © Pierre Miglioretti

Collection particulière © Pierre Miglioretti

mieux vaut court que jamais #296

Le message vide,

Signe l’infamie de la traîtrise

Triste éphéméride,

En trace de mépris de la mainmise.

 ***

Je sais désormais ce qui se cache derrière la démarche de mon chat s’enfouissant sous le lit à l’allumage de mon aspirateur ménager : un mépris sans fin et vainement feint pour mon usage insatiable de la technologie.

 ***

Faisant deux pas au dehors de la maison d’arrêt, il s’arrêta quelques instants face à l’imposante bâtisse. La jaugeant d’un regard ferme et dédaigneux, s’extirpant après de longs mois de ses bras de fers, faisant rouler dans sa mémoire le sombre jugement qui l’avait conduit là, il prenait fort logiquement la figure du mépris de justice.

mieux vaut court que jamais #295

Fixant avec désir sa nuque, je me demandais : et si sa queue de cheval n’en était pas une véritable ?

 ***

Son collier, toute nouille qu’il était à l’emberlificoter sans arrêt, le renvoyait à son ancien état d’écolier.

***

Le rasoir passé par là il y a quelques heures, comme une porte marquée d’une pancarte « peinture fraîche », lui rendait la nuque si imberbe que l’on regrettait déjà la jachère libertaire qui s’étalait, de coutume, sur la zone sommitale de son dos.

fables modernes #107 : le superfétatoire et la fée de Thouars

Ils n’avaient pas fini dans le thouarsais,
Sombrant dans le désespoir rance,
De croire en une victoire au Tiercé,
Comme une seule et unique espérance.
Etonnamment dans cette bourgade,
Il n’avait pas été envisagé autre remède,
Face à l’économie tombée en rade,
Que l’obtention de providentielles aides,
Parmi lesquelles ainsi on comptait
Les chevauchées des courses équines,
Même si l’on n’avait jamais dompté,
Dans ce village, la moindre féline.
Chaque habitant, misant ses économies,
Chaque jour ou chaque semaine,
De sorte qu’il n’était plus de mamies,
A garnir le moindre bas de laine.
Les banques se voyaient comme closes,
De n’avoir plus de liquidités confiées,
Et sentant se dessiner un avenir morose,
Fuirent suivant la monnaie se raréfier.
Si l’épargne n’était initialement pas minime,
Les capacités fiduciaires à miser,
Devinrent, avec tout leur entêtement, infimes,
Pour bientôt totalement s’amenuiser.
Il vint pourtant dans ce foutoir,
Une étrange et saugrenue apparition,
Celle de la fameuse fée de Thouars,
Qui au royaume de France fit l’annexion.
Car, assistant Bertrand du Guesclin,
Pour l’Aquitaine réduire à la soumission,
D’une poignée magique de mesclun,
Elle vint apporter la suprême solution.      
La fée, alimentant judicieusement
Quelques chevaux triés sur le volet,
Récompensa les villageois grassement,
De ne s’être point foulés les mollets.   
 
 
Si la providence peut mener à l’indigence,
Il peut être, pour le fainéant accompli,
Le plus sûr moyen d’atteindre l’opulence,
Sans risquer le moindre mauvais pli. 

mieux vaut court que jamais #294

On a du mal à se le figurer mais derrière chaque spam ou autre prospectus indésirable se trouve une armée d’êtres humains, faits de chairs et d’os, avec la conscience aiguë d’être ô combien désagréable pour tout un chacun, conscience matinée d’une préoccupation pour la tranquillité d’autrui étonnement réduite.

***

La rumeur qui nous imprègne le sabot, marque de putréfaction qui s’étend et démange en sordide irritation, s’avère être un des organismes les plus vivaces qui soient. Se reconfigurant au détour d’une parole, au contact de divers êtres, sa capacité de mutabilité excède fortement tout autre forme d’organisme vivant.

***

La commère, dans le temps suspendue,

Stagnant placidement sur la chaussée,

De la rumeur fraichement entendue,

Que sa vie curieusement encensait,

S’extasie jusqu’à ses papilles,

S’écriant de ces paroles en l’air,

Cessa, interrompue par sa fille :

« On entend s’étendre l’échos, mère »

mieux vaut court que jamais #293

Si on ne saura sûrement jamais qui vint le premier de la poule ou de l’œuf, il en est de même pour l’origine de bon nombre de choses existantes en ce bas-monde. Ainsi est-ce de l’épave, navire en déshérence et sombrant sous le flot des océans qu’est issue l’épave, homme en désespérance et sombrant sous le flot de l’alcool ?

 ***

L’ignorance à peine feinte de l’identité corpopétrussienne en dehors de son génome ferroviaire particulièrement prononcé militerait pour l’absence de toute forme de vie ayant pu s’y développer avant l’arrivée du chemin de fer dans cette bourgade de Saint-Pierre-des-Corps. Cela est pourtant regrettable pour cette ville qui s’est bâtie comme périphérie funéraire de la ville de Tours avant d’en être la banlieue nourricière. La réduction iconique fait ainsi passer au second plan bon nombre de spécificités du macchabée au maraîchage.

 ***

Nul ne connaît l’origine de l’éternité. Certains, de longs et anciens temps, racontent même qu’elle dure depuis toujours pour ne jamais s’achever. Cependant, comme ils n’ont pas assisté à la naissance de l’éternité, leur parole n’est peut-être pas la plus fiable qu’il soit.

les voies de l'origine sont impénétrables © Pierre Miglioretti

les voies de l’origine sont impénétrables © Pierre Miglioretti

mieux vaut court que jamais #292

A défaut d’avoir trouvé gâteau qui siérait à son appétit, elle avait pris la caisse en fer blanc, peinte à l’avenant, et traversa la ville comme transportant de précieuses pâtisseries. Seulement, ne songeant point à la nature précise de son butin, elle ne se figurait pas que sa mitraille était de chocolat.

***

Si derrière un X se cache souvent de nombreux butins, de ces cartes aux trésors trouvant leur apothéose derrière cette marque alphabétique, personne ne cherche jamais à voir, sur ces mêmes cartographies aléatoires – les cartes aux trésors ne s’enquièrent guère de la précision géométrique en en faisant d’ailleurs une épreuve essentielle de la discipline – la signification des o qui peuvent parfois les revêtir. Si on s’est souvent figuré cela comme des représentations schématiques d’arbres ou de bosquets, on ne s’est jamais imaginé qu’il pourrait s’agir, relativement à ces O, d’indications permettant la localisation de l’origine du monde, eut égard au O de l’origine du diagramme mathématique.

 ***

Le meilleur ami de l’homme, en matière de chasse au trésor, n’est pas celui que l’on croit. Si en vertu de son flair ravageur pour chasser la bécasse, la truffe ou la cocaïne, le chien nous vient premièrement à l’esprit, mieux vaut s’en remettre aux pratiques et comportements du chat. Car de ses cadeaux qu’il peut offrir à ses maitres, dont le lieu de dépôt, quand le paquet n’est pas remis en main propre, ni même n’est pas marquée du trou creusé à l’instar de l’os du chien, il en ressort une véritable diversité et surtout animale allant de la souris au moineau. Tandis que l’aléa de la localisation rend la découverte encore plus déconcertante.

mieux vaut court que jamais #291

Bien des lois trouvent quelques cas où l’on ne peut les appliquer, ou pour certaines quelques circonstances atténuantes. Ne pourrait-on pas prévoir, a minima, si le principe ne peut être inversé dans sa globalité, quelques exceptions à l’attraction terrestre et son corolaire de gravité ?

***

Nul ne rechignerait ainsi à inscrire dans les tablettes de cette loi un paragraphe consacré à l’aiguille, qui, sans cela, finit sans arrêt au fond d’une botte de foin. Il pourrait, si le législateur voulait se montrer tolérant, en être ajouté un autre pour le fil à coudre accompagnant ladite aiguille qui, lui aussi, indéniablement, a tendance à choir au sol, bien souvent composé d’un tissage se présentant sous la forme d’une moquette ou d’un tapis, le rendant tout autant indécelable que son acolyte métallique.

 ***

Il ne faudrait surtout pas répondre aux sirènes de ceux, extrémistes, qui exigent l’abolition intégrale de la gravité. Cela est une mesure totalement inconsidérée. Ainsi nous devons d’emblée exclure la chose florale, car outre user de manière intempestive des jardinières pour fixer les plantes dans les airs il ne serait plus de moyens de rester au raz des pâquerettes.

Floating earth © Pierre Miglioretti

Floating earth © Pierre Miglioretti