mieux vaut court que jamais #477

On évoque sans vergogne le goût naturel de l’homme de se trouver – surtout après qu’il s’en est extrait – sur le plancher des vaches. Toutefois nul homme ne s’est penché sur la question de savoir si les vaches se satisfaisaient entièrement de leur condition de terrestres.

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Soit dit en passant, nul ne se préoccupe de son entretien, au dit plancher des vaches que les bovidés foulent sans vergognes avec leurs gros sabots qui ne sauraient être de tout repos. Ce n’est pas d’un coup de balais et d’un passage de serpillière que l’on l’en retrouve dans sa propreté immaculée, que cela leur soit signalé.

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Quand les vaches auront débarrassé leur plancher, peut-être songerons nous à renouveler le revêtement terrestre. Le retour à la terre battue ne peut être à exclure.

mieux vaut court que jamais #476

Son rêve de grandiose et de divin était finalement assez élémentaire et se limitait à une expérience particulière, celle de pouvoir, au guidon de son vélo, rouler à toute berzingue sur une grande avenue à l’instant exact, entre chien et loup, où les lampadaires, l’un après l’autre, s’allument.

« Que la lumière fut » se dirait-il alors.

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La négociation avec Dieu sera-t-elle envisageable à l’aube du jugement dernier ? Aurons-nous loisir de converser avec lui avant qu’il ne rende son jugement ? Qu’il le sache dès à présent, mes exigences ne seront que très minimes et quelques minutes à tailler le bout de gras en sa compagnie, me seront suffisantes à plaider mon cas et obtenir gain de cause.

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Les voies du Seigneur sont impénétrables nous disent les Evangiles. Pourtant, au vu des différentes manifestations divines, en supposant qu’il ne frappe pas deux fois au même endroit, on peut écarter de notre esprit quelques lieux d’apparition : il est ainsi à exclure toute manifestation divine à venir dans une grotte, dans le désert ou aux alentours de buissons. Les lieux d’isolement étant prisés, il est fort probable que le premier homme à rejoindre Mars sera une cible privilégiée pour une quelconque forme d’intervention divine.

mieux vaut court que jamais #475

Il avait choisi de vivre dans un monde parallèle, une réalité particulière où les affaires iraient mieux, où  l’intégrité des hommes serait sauve, il avait choisi de vivre dans une uchronie où Jospin n’avait pas perdu 2002.

Pourtant, même là, ne pouvait-il pas s’empêcher d’être déçu.

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Aller ailleurs, certes l’idée est intéressante. Mais encore une fois fuir, refuser la réalité et prendre la tangente. Il faut parfois s’y confronter.

Et pourtant encore une fois, ces poubelles que personne ne sort et pour lesquelles je ne peux me résoudre à laisser un mot sur la porte… mieux vaut juste claquer la porte.

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L’autre est un ailleurs se prête-t-on à penser parfois, dans notre soif de découvrir l’altérité et qu’elle nous ouvre d’autres horizons.

Pour peu que l’autre soit ailleurs et sombre-t-on dans un triste horizon. La nuance est mince.

mieux vaut court que jamais #474

J’écris en guise de thérapie serait-on tenté de croire. Dans la quotidienneté du mot, se soigneraient d’un coup d’un seul, timidité maladive, cyclothymie et troubles de la personnalité.

Pourtant à la quantité de lignes produites, j’aurais mieux fait d’accumuler quelques séances sur le divan.

L’explication thérapeutique ne résiste pas longtemps à l’épreuve de l’efficacité.

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Qu’il pleuve qu’il vente ou qu’il neige, il sort sa plume pour gratter du papier. A vrai dire, plus les conditions sont déplorables, plus s’y adonne-t-il. Car comme tout homme moderne, dès qu’un rayon de soleil point à l’horizon, se réfugie-t-il dans le jardinage, la course à papier, voire même le pic-nic familial.

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Il écrit pour ne pas mourir nous dit-on. Ceci étant, il omet l’expérience de l’intégralité des écrivains dont pas un n’a, à ce jour, réussi à échapper au trépas, suivant finalement, comme tout un chacun, la loi humaine de la mortalité.

mieux vaut court que jamais #473

Sous le auvent, de la pluie abritée, les trois mamies guettent les matous. Pas intrépides pour deux sous, les chats ne se risquent à sortir de leur tanière, même pour quelques croquettes. Ainsi, se poursuivra le face-à-face tant que de l’averse, le temps ne virera à l’éclaircie.

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L’amateur amadoué par les moustaches du beau mâle, ému, le masse. Lui, se lèche les babines, qu’il remue comme un aliment qu’il mastique.

Précipitamment passe un moustique. Le chat déguerpit à ses trousses et l’homme demeure penaud, sans la chaleureuse fourrure.

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Il s’émeut d’être mien,

Je l’étreins d’être mou,

Son ronron de félin,

Le secoue de remous.

mieux vaut court que jamais #472

La nervosité bouillait en moi,

Leste et proie de mes émois,

Le crayon céda sous mon poids.

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Les nerfs, la pelote, et rebelote, dans les aiguilles je m’enferre.

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En rage et en proie à une colère soudaine, toutes affaires cessantes, il prend la porte et bientôt s’enfuit dans l’escalier dont il descend les marches quatre à quatre. En bas de l’immeuble, la porte claque d’une violence qui n’est pas la sienne.

Effrayé, il regrimpe lentement les étages dégringolés.

mieux vaut court que jamais #471

L’épouvantail se jouait si bien des oiseaux qu’il n’en voyait plus le moindre ramage depuis belle lurette. Bientôt, il ne sut plus même les reconnaitre et en devint dépourvu d’efficacité.

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Invariablement sort de son étui,

Dans la malédiction et la facétie,

L’impétueux et sombre parapluie ;

Pourtant des intempérie le messie.

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Les pressions répétées sur la manette destinée à cet effet lui avait rendu la taille de ses 5 ans. Sur son fauteuil molletonné équipé d’accoudoirs cuir, le PDG faisait plus que jamais enfant gâté.

mieux vaut court que jamais #470

L’épuisement me guette. Pas au coin de la rue comme une forme sombre et inquiétante, adepte de la rapine et de la petite cambriole. Non au devers de l’oreiller, dans les heures où le sommeil me fuit par une porte dérobée.

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La fatigue de l’ennui et de la monotonie que certains attrapent dans le canapé, quand jadis elle se cantonnait au siège ancien demeuré à l’ombre d’une lumière revêtue d’un vieil abat-jour, s’étend aussi à de nombreuses places assises, des tramway aux métros en passant par des salles obscures trop modernes pour visionner un film ou des théâtres trop à la mode pour tenir éveiller.

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De ses longues heures,

Enlaçant âme et cœur,

La sombre langueur

Se fait alors marqueur.

mieux vaut court que jamais #469

La vie t’oppresse,

Oh presque rien,

Elle s’empresse ;

Filtrée des reins,

Du vin de messe,

Il ne restera rien.

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Dans la masse, certainement quelques hystériques, schizophrènes ou autres malheureux atteints de profonds maux. Mais lesquels sont-ils ? Comment savoir auquel s’adresser pour se rassurer sur son propre état mental à peu de frais ?

En plus, agoraphobe à la petite semaine, je ne songerais m’immiscer dans cette foule.

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Le mur de l’hospice est poreux. Pour peu qu’on y tende l’oreille et sent-on le quand-dira-t-on de l’intérieur. L’extérieur s’y épanche aussi et que les fous se penchent au dessus du mur et se sentent-ils déjà les ailes de l’ailleurs.

Les pierres réceptacles des deux mondes, font la symbiose des sens.

mieux vaut court que jamais #468

– J’ai affreusement mal dormi cette nuit.

– Y a pas une lune ?

– Non juste le voisin du dessus.

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S’il ne déménage pas quotidiennement – et souvent nuitamment – le voisin du dessus reprend la disposition de son intérieur ou s’assure de l’essorage parfait de son linge. Il n’est pas un voisin du dessin qui n’use, pas à sa manière, de la puissance de nuisance sonore des chaussures. Le voisin du dessus est toujours un sale type quand celui du dessous est le type que l’on ignore.

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De loin, entends-je crier « eh c’est mon voisin ». Trop tard, j’étais déjà trop loin pour m’assurer de l’équivalence de voisinage. Celle-ci est pourtant difficile à déceler dans ma posture d’ermite d’immeuble, faisant de mes apparitions dans la cage d’escalier celles d’un fantôme s’extrayant de son clapier pour déguerpir au plus vite.

Un sixième sens sans doute ou une alcoolique méprise.